Tremblement de terre 2010 : Haïti au carrefour des catastrophes naturelles

12 jan 2017

Tremblement de terre 2010 : Haïti au carrefour des catastrophes naturelles

Photo: Logan Abassi - UN/MINUSTAH

Photo: Logan Abassi - UN/MINUSTAH

 

« 12 janvier 2010, une date qui restera gravée dans ma mémoire à jamais » lâche Jean-Eddy Thomas, l’air pensif et  les yeux perdus dans le vide. La quarantaine révolue, il a fui Port-au-Prince au lendemain de la catastrophe pour retourner dans son patelin, les Gonaïves, avec des images atroces plein la tête.

« Je me retrouve avec trois mineurs à élever à cause de cette tragédie, »  se lamente le jeune homme qui s’est converti en chauffeur de taxi pour subvenir aux besoins de ses neveux orphelins. En une nuit, Thomas est donc passé du statut de célibataire insouciant à celui de père de famille. Malgré tout, le nouveau chef de famille s’estime chanceux car il connait « des familles qui ont été totalement décimées »

Haïti a connu, entre 2004 et 2010, trois grandes catastrophes majeures en raison de sa situation géographique et de sa vulnérabilité aux désastres naturels. Plus graves les uns que les autres et avec de lourdes conséquences sur l’environnement, l’économie du pays et la population en général. Ainsi, en l’espace de quatre ans, la ville des Gonaïves a été trois fois totalement submergée par les eaux suite au passage des cyclones Jeanne, Hanna et Ike sur le pays.

Appauvries et dépitées, certaines familles ont migré vers la capitale qu’elles seront contraintes de quitter deux ans plus tard en raison de l’ampleur des dégâts causés par le tremblement de terre de magnitude 7 qui frappe Port-au-Prince en 2010. C’est, entre autres, l’histoire de Lisette Augustin.  Cette mère célibataire, originaire des Gonaïves, chef-lieu du département de l’Artibonite,  a perdu tous ses biens et sa fille unique de surcroit.  Au total, deux départements-le sud et l’Ouest - ont subi des dommages considérables. Près de 250,000 personnes sont mortes, des milliers de maisons ont été détruites obligeant des milliers de familles à se réfugier dans des camps de fortune.

Six ans plus tard, alors qu’Haïti se prépare à commémorer ses morts, l’ouragan Matthew vient allonger la liste des victimes. Octobre 2016, 546 personnes (source : gouvernement haïtien/ OCHA) perdent la vie dans les départements du Sud, du Nord-Ouest, des Nippes et de la Grande Anse suite au passage de l’ouragan Matthew de catégorie 4. « Plus de 120 000 maisons ont été endommagées ou détruites, 80 à 100% des récoltes sont perdues dans les zones les plus touchées », selon le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en Haïti.

 

La vulnérabilité d’Haïti aux catastrophes naturelles, objet de réflexion

A quelques jours de la 7ème commémoration du terrible tremblement de terre de 2010, l’Etat haïtien a décidé, par arrêté présidentiel, de faire du 12 janvier une « Journée nationale de réflexion et de sensibilisation sur la vulnérabilité d’Haïti face aux risques et désastres ».  A cet effet, sur tout le territoire du pays, les festivités pré-carnavalesques sont remplacées par des activités artistiques et œcuméniques.

Le Ministère de la Culture et de la Communication d’Haïti, dans un communiqué datant du 10 janvier 2017, invite tous les secteurs de la vie nationale à initier « davantage de réflexion sur les potentiels risques et menaces auxquels le pays est exposé, et ainsi s’engager pleinement sur la voie d’une sensibilisation sans relâche face aux risques et menaces identifiés ».

 

Photo: Logan Abassi - UN/MINUSTAH

Vers la reconstruction du pays

Entre 2010 et 2016, l’État haïtien, appuyé par ses partenaires, a initié plusieurs projets visant la reconstruction sécuritaire du pays sur le long terme. L’accent a surtout été mis sur la qualité de la construction. A ce propos, des documents relatifs à la construction et réparation de petits bâtiments, entre autres, ont été élaborés ; une caravane du Ministère des travaux publics, transport et communication (Mtptc) a fait le tour du pays ; des professionnels de l’immobilier ont été formés.

Toutefois, certains estiment que davantage d’efforts devraient-être déployés en vue de parvenir à l’application stricte des mesures prises dans ce domaine. « Aujourd’hui plusieurs maisons ont été et sont en train d’être reconstruites en dehors de toutes normes et sans aucun contrôle de l’État Haïtien », regrette Marianne Jean Louis, mère de quatre enfants.

Selon des chiffres publiés par l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), de juillet 2010 à décembre 2016, 87,085 ménages ont quitté les camps grâce aux programmes de subvention au logement. Ce qui a facilité la fermeture de 547 sites et a réduit de 97%  le nombre de ménages déplacés.

Par ailleurs, dans le Sud et la Grande Anse, les départements les plus touchés par l’ouragan Matthew, des travaux à haute intensité de main d’œuvre,  visant la reconstruction des infrastructures endommagées et la recapitalisation des habitants, sont en cours.

Un accord de partenariat pour créer près de 28 000 emplois d’urgence dans les régions affectées par l’ouragan Matthew a été signé en ce sens,  le vendredi 16 décembre,  entre le gouvernement haïtien, à travers le Fonds d’Assistance Economique et Sociale (FAES) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), avec l’appui financier de la Banque Inter-Américaine de Développement (BID), peut-on lire sur le site du PNUD.

 

Photo: Logan Abassi - UN/MINUSTAH

Photo: Logan Abassi - UN/MINUSTAH

La MINUSTAH honore ses victimes

Si le tremblement de terre a fait, selon les autorités étatiques, plus de 250,000 morts, 102 étaient membres de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Pour honorer l’ensemble de ces victimes, chaque année, un mémorial est organisé à la base logistique de la mission à Port-au-Prince pour leur rendre hommage et saluer leur contribution au travail de stabilisation d’Haïti.

Consciente des progrès accomplis pendant les six dernières années en matière de relèvement et de développement, et gardant à l’esprit les défis qui demeurent dans ces domaines, la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en Haïti, Madame Sandra Honoré, a exprimé son espoir que “ce jour de souvenir serve aussi d’inspiration afin de travailler ensemble pour une Haïti stable et prospère.”

 
 
Rédaction: Taina Noster