Photo Jean Patrick Mackintosh UN/MINUSTAH

« Le commerce ne me rapporte pas ces temps-ci. On achète toujours au comptant et revend à crédit. Et, le faible bénéfice gagné est consommé par les enfants », se désole Gertrude, les doigts couverts de poussière de charbon. L’air accablée, elle se met debout pour recevoir un visiteur tout en étant occupée à veiller sur deux enfants qui s’enveloppent dans sa jupe évasée comme pour se cacher.

Marie Gertrude Jérôme, habite une maisonnette de deux pièces dans le quartier de Trou Couleuvre,  non loin de la ville des Gonaïves depuis environ deux ans.  

Cette mère de 32 ans qui a perdu son mari quatre mois avant la naissance de leur troisième fillette, s’adonne au commerce de charbon pour s’occuper de ses mômes.

Pendant qu’elle réfléchit à une solution durable pour la survie de sa famille, un homme qui, apparemment frise la trentaine vient frapper à sa porte un jeudi après-midi pour lui parler de « Kore Lavi ». Ce programme de protection sociale vise en particulier les familles économiquement faibles auxquelles sont offerts des coupons d’achat de nourriture.

Kore Lavi, selon lui, se donne pour objectif de « réduire l’insécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages les plus vulnérables en Haïti, tout en favorisant la promotion des produits locaux ».

Remplir un questionnaire est nécessaire pour inscrire cette femme sur une liste d’attente de 2400 potentiels bénéficiaires de ce programme qui commencera vers la 2^ème moitié du mois de mars aux Gonaïves.

Kore Lavi aux Gonaïves, c’est venir en appui…..prévenir la malnutrition

Présent dans plusieurs communes du pays notamment  aux Gonaïves, « Kore Lavi » vient en appui aux institutions gouvernementales de protection et d’assurance sociale de la république. Ainsi, la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA), à travers une enquête de proximité a questionné 12,500 ménages au niveau des 13 quartiers populaires des Gonaïves et ses cinq sections communales.

Le coordonnateur de terrain pour la CNSA, Richard Jean Milou, estime opportun l’appui des autorités locales dans ce travail. « L’évaluation des ménages situés dans les zones urbaines et rurales des Gonaïves nous a permis de mieux comprendre le besoin des gens », conclu-t-il.

Photo Jean Patrick Mackintosh UN/MINUSTAH

Dans cette même veine, le Field Manager de Kore Lavi au sein de l’organisation Action Contre la Faim (ACF) aux Gonaïves, Niels Quarante, estime que Kore Lavi est porteur d’un projet d’espoir pour qu’un jour il y ait la possibilité de couvrir tout le pays à travers un programme de protection sociale. Selon lui, les résultats attendus seront réjouissants et prometteurs.

Photo Jean Patrick Mackintosh UN/MINUSTAH

Cet avis est partagé par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) qui est un partenaire primordial de ce programme. Pour Kokou Amouzou, officier de l’information et d’enquête chargé de l’exécution du programme Kore Lavi, le PAM qui fait parti du consortium intervient essentiellement dans le ciblage.  Conformément à son mandat, nous dit Kokou Amouzou, « le PAM assiste la population vulnérable en Haiti à travers les cantines scolaires, les activités de cash for asset ». Sous peu, conclu-t-il, l’agence onusienne interviendra dans la crise agricole liée à la sécheresse.

Accompagner les personnes les plus vulnérables en renforçant le système agricole haïtien peut aider à réduire l’insécurité alimentaire et du coup, ménager le panier des familles, plaide le directeur départemental de l’Agriculture, agronome Jocelyn Jean. Partant de ses expériences de terrain, Jocelyn Jean croit que le département de l’Artibonite possède les caractéristiques agricoles suffisant pour alimenter tout le pays. Cependant, « la sécheresse ajouté aux autres éléments perturbateurs, notamment le phénomène ‘’El Nino’’ a affligé les planteurs au point qu’il hésite à s’investir dans la culture de la terre s’ils ne sont pas encadrés par l’État ». regrette-t-il,

Financé par l’Agence Américaine pour le Développement International (USAID), Kore lavi, prendra fin en septembre de l’année prochaine et devra toucher  plus de 150000 ménages enrôlés dans le système d'information à travers le ciblage et 17500 d entre eux bénéficieront du filet social coupon d'achat. Pourtant, dans le dernier bulletin de la CNSA, les facteurs réunis laissent croire que les conditions de sécurité alimentaire des ménages déjà en crise tendent à se dégrader.

Jean Patrick Mackintosh