Ronald Joseph ou l’école de l’espoir à Cité Soleil

14 déc 2012

Ronald Joseph ou l’école de l’espoir à Cité Soleil

Ayant perdu l’usage de ses jambes en 1997 suite à un accident de moto, Ronald Joseph, 38 ans, dirige la seule école pour handicapés de la commune populaire de Cité Soleil qu’il a fondée le 11 mars 2011 avec le soutien financier de l’ONG Help for Haïti. Portrait d’un passeur de rêves.


Ronald Joseph ou l’école de l’espoir à Cité Soleil


galerie

Photo : Logan Abassi – UN/MINUSTAH

« Depuis mon accident de moto, j’avais toujours rêvé de fonder une école pour enfants handicapés », explique Ronald Joseph, assis sur sa chaise roulante dans l'unique classe de son école du quartier de Parc des Princes, à Cité Soleil. Les yeux rivés sur le tableau noir, ce natif de Saint-Raphaël, dans le Nord d’Haïti, raconte comment il en est arrivé là, malgré les entraves et les coups durs.

Débrouillard, après être venu tenter sa chance à Port-au-Prince dans les années 80, il se lance dans les courses à moto et se fait remarquer du Maire de Port-au-Prince de l’époque, Franck Romain, après une victoire à la course de la Mairie en 1989.

En 1995, il poursuit son chemin et devient garde du corps du Maire d’alors, Joseph Emmanuel « Manno » Charlemagne. Mais sa passion pour la moto le rattrape et, dans un accident le 25 août 1997 lors d’un déplacement officiel au cap Haïtien, sa moelle épinière se sectionne et Ronald perd l’usage de ses jambes. « Malgré des soins reçus à Santo Domingo en République Dominicaine, je ne pouvais plus marcher et je suis resté paralysé à vie », raconte-t-il, le visage assombri.

« Mais tout ne s’est pas arrêté là pour moi », rebondit Ronald qui, depuis ce jour, caresse alors l’idée de fonder une école pour les nombreux enfants handicapés et non scolarisés de sa commune défavorisée. « Une école qui leur permette de se sentir capables de servir et de travailler, bien qu’en Haïti – et ce, bien avant le séisme – une personne née ou devenue handicapée est pointée du doigt et mise de côté », explique-t-il.

Avec le peu d’argent d’une pension qu’il reçoit chaque mois, il investit dans différents « business », de l’épicerie au bric-à-brac. Motivé, afin de favoriser l’intégration des personnes handicapées de Cité Soleil dans la société, il fonde l’Association des Personnes Handicapés Progressistes (APHAP).
Le séisme du 12 janvier 2010 est un nouveau coup dur pour Ronald, qui perd sa fille dans la catastrophe « comme beaucoup de compatriotes ». « En voyant ces enfants meurtris dans leur corps ou handicapés à vie après le séisme, je me dis que c’est le moment de réaliser mon rêve et construire une école pour eux », dit-il, souriant à nouveau.

Une école de l’espoir à Cité Soleil

Avec des moyens limités et surtout grâce au soutien financier d’une organisation non gouvernementale qu’il sollicite, Help for Haïti, l’Ecole Mixte des Enfants Handicapés de Cité Soleil est fondée le 11 mars 2011, soit un an après le tremblement de terre. Déjà une cinquantaine d’écoliers de la première à la sixième année fondamentale y suivent régulièrement des cours dispensés par quatre enseignants.

Ronald Joseph ou l’école de l’espoir à Cité Soleil« Nous recevons des enfants handicapés physiques et mentaux », souligne la Responsable de Help for Haïti, Sandra L. Koch qui ajoute qu’ « avec les travaux d’agrandissement actuels, l’école va fonctionner également les après-midis afin de permettre à beaucoup plus d’enfants d’accéder à l’instruction ». Outre la construction de l’établissement, l’ONG fournit également des repas aux écoliers.

Bien qu’il reste encore beaucoup à faire, les enfants sont heureux de suivre des cours dans cette école. Comme Baltazar, 13 ans, qui a perdu sa jambe gauche lors du séisme, et dit, simplement, qu’il se « sent bien dans cette école ».

Agé de 38 ans, Ronald Joseph pense au futur, à la survie de l’école. « Mon objectif est presque atteint, mais je compte encore sur le soutien de plus d’un pour permettre à ces jeunes de devenir des citoyens honnêtes et utiles au pays malgré leur handicap » espère-t-il, optimiste.

Jonas Laurince