Conférence de presse du Secrétaire général adjoint aux Opérations de maintien de la paix de l’ONU
Intervention de la porte-parole de la MINUSTAH, Ariane Quentier
Bonjou tout moun,
Je ne pense pas devoir vous présenter le Secrétaire général adjoint en charge des Opérations de maintien de la paix qui est en visite en Haïti pour l’investiture du président de la République, mais également pour mener la Mission d’évaluation stratégique. M. Ladsous fera quelques remarques d’introduction. Je tiens à saluer aussi Madame Honoré qui est la Représentante spéciale du Secrétaire général, et le Force Commander qui est à la tête des Forces militaires de la MINUSTAH.
M. Ladsous va vous faire quelques remarques d’introduction. Nous prendrons ensuite vos questions.
Je vous remercie par avance d’éteindre vos téléphones portables si vous en avez. Merci
Intervention du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix
Bonjour Mesdames et Messieurs. C’est un plaisir de vous rencontrer à nouveau comme à chacun de mes passages en Haïti. Il y en a eu quelques-uns ces dernières années.
Je suis venu à Port-au-Prince ces trois derniers jours pour deux raisons principales. La première c’était d’assister à la prestation de serment du président de la République d’Haïti, le 58e président et de lui transmettre les félicitations et les vœux de plein succès du Secrétaire général des Nations Unies. Le second motif, c’est parce que, vous le savez, le Conseil de sécurité, lorsqu’il a renouvelé la dernière fois le mandat de la MINUSTAH, a souhaité qu’à la prochaine échéance qui se situe le 15 avril, il ait des éléments pour se prononcer sur le paramétrage du mandat de la MINUSTAH.
Comme le Secrétaire général doit formuler des recommandations à l’adresse du Conseil de Sécurité le 15 mars, j’ai tenu à venir tout de suite pour travailler bien sûr avec nos collègues de la MINUSTAH, mais aussi travailler avec nos interlocuteurs haïtiens pour voir quel était leur vision sur la MINUSTAH et son avenir. Tout ceci, ce sera évidemment la prérogative du Conseil de sécurité que de prendre les décisions. Mais je peux partager avec vous quelques grands paramètres qui me paraissent assez dégagés.
Le premier c’est que la composante militaire de la MINUSTAH devrait selon toute vraisemblance s’effacer dans un avenir relativement proche. On est en train de regarder les modalités. Un second paramètre, c’est le fait que nous avons beaucoup travaillé ces dernières années, nous avons beaucoup investi dans une relation d’ailleurs dont je voudrais saluer la constance et la qualité. Nous avons travaillé au développement de la police nationale haïtienne. Nous avons travaillé sur les effectifs. Nous atteindrons dans le courant de l’année, lorsque la promotion qui est actuellement en cours de formation entrera dans les effectifs réguliers de la PNH, nous atteindrons un effectif de 15.000 policiers. Mais je crois qu’il y a matière à continuer parce que les besoins sont bien là. Et de la même façon, nous allons continuer à travailler sur le renforcement des capacités de la police nationale haïtienne dont je veux une nouvelle fois saluer le professionnalisme, l’engagement de ses responsables. Je crois constater que tout cela n’est pas sans effet.
Vous savez que l’un des cœurs de la mission de la MINUSTAH, c’est la stabilité. Et quand on voit que les élections au cours des derniers mois se sont bien passées. Il y a eu des incidents mais peu nombreux. Donc rien de très grave. Je crois que c’est quelque chose qu’il faut porter au crédit de la Police nationale haïtienne comme d’ailleurs au crédit du Conseil électoral provisoire, au crédit aussi de la MINUSTAH qui est là en termes de recours. Donc je crois que c’est quelque chose dont il faut prendre acte. Et puis un troisième axe qui est très important, c’est la nécessité absolument impérieuse de tout faire pour renforcer l’Etat de droit en Haïti. C’est l’un des cœurs de notre mission et cela se traduit par toute une série de chantiers mais je crois que… pour que la République d’Haïti puisse connaître enfin la croissance, que les opérateurs économiques investissent, il faut davantage de sécurité, y compris de sécurité juridique. Et je crois que le président de la République – nous avons eu un très bon entretien hier – a marqué un engagement sans faille sur ce point.
Je crois que lorsque l’on regarde la situation dans ce pays par rapport à ce qu’elle était, il y a quelques années, on a quand même beaucoup avancé. La sécurité n’est pas parfaite, mais je crois qu’elle est quand même bien meilleure. Et je voudrais d’ailleurs à ce propos envoyer un petit message à certains éléments négatifs, car il y en a encore, des « spoilers » comme on dit en Anglais qui pourraient être tentés de dire : « Eh bien voilà, on va profiter de ce qu’il y a un nouveau gouvernement qui est en train de s’installer on va profiter de ce que la MINUSTAH est en train de se re-profiler pour faire avancer nos agendas à nous ». Je voudrais leur dire, à toutes ces forces négatives, n’y comptez pas. Nous sommes bien là et nous veillerons à ce que les choses se gèrent comme elles doivent se gérer dans l’ordre avec un ordre public respecté par tous.
Nous allons rentrer à New York. Nous allons faire un rapport au Conseil de sécurité et celui-ci prendra, le moment venu, ses décisions. Donc encore une fois, je voudrais dire à quel point – je l’ai dit à l’instant à notre personnel – tous les agents de la MINUSTAH, sous la houlette de Mme Sandra Honoré, notre Représentante spéciale dont je veux saluer le travail remarquable et l’engagement sans faille. Je crois que tout le monde s’est dévoué sans compter au service d’Haïti et de son peuple. Vraiment c’est quelque chose qui fait chaud au cœur et qu’il faut reconnaître. Voilà ce que je voulais vous dire. Est-ce qu’on va prendre quelques questions ?
Intervention de la porte-parole de la MINUSTAH, Ariane Quentier
Je vous remercie. Je vous rappelle que cette conférence de presse est diffusée en direct sur Facebook et sur MINUSTAH FM. Nous allons prendre quelques questions. Je vous remercie par avance de vous présenter et le média au nom duquel vous posez votre question pour que M. Ladsous puisse y répondre.
Questions / Réponses
RCH 2000 : Vous avez dit que la MINUSTAH va s’effacer. Nous autres les journalistes nous aimerions avoir une date, à quand le retrait définitif de la MINUSTAH.
HL : Deux choses, d’abord les dates : ce sera au Conseil de sécurité de les déterminer. Deuxièmement, nous ne parlons pas à ce stade d’un effacement complet de la MINUSTAH. Nous parlons d’une reconfiguration qui se traduira peut-être formellement par un nouvel intitulé, je ne sais pas. Mais je le redis, si les tâches des militaires vont s’effacer, car elles ne s’imposent plus dans le contexte sécuritaire qui est celui d’Haïti, il y a en revanche beaucoup de travail à faire encore sur la police, sur l’Etat de droit, toute une série de chantiers comme cela, en n’oubliant pas les droits de l’homme, le statut de la femme, je crois qu’en ce sens-là, nous avons encore du travail et que nous y restons prêts.
Radio Kiskeya : La MINUSTAH a plus de 10 ans sur le sol haïtien. Pour la population haïtienne, en regard du peuple, la MINUSTAH est une force présente dans le pays pour sécuriser uniquement les autorités, pour protéger le Palais national. Alors que dans son bilan pour le peuple, c’est le choléra, le viol de plusieurs de nos jeunes, c’est aussi des femmes enceintes. Quel est votre regard sur ces questions, sur ce bilan de la MINUSTAH par rapport à la population haïtienne, Monsieur Ladsous ?
HL : Vous faites allusion à des faits qui se sont avérés absolument lamentables. Je pense à ces cas de viol. C’est évidemment inacceptable, c’est une honte et nous faisons tout ce que nous pouvons pour que les mesures nécessaires soient prises et en fait pour essayer d’éviter, c’est-à-dire de travailler en amont d’information. Il y a un travail d’aide aux victimes, nous y consacrons beaucoup d’efforts. Encore une fois, il ne s’agit pas de nier cela, mais il faut en même temps éviter d’être un peu trop réducteur.
Notre travail n’est pas de protéger les autorités, c’est de protéger, d’offrir la sécurité et la stabilité à l’ensemble du peuple haïtien. Et je crois que le fait même – je l’ai signalé – que lors des dernières élections qu’il y a eu un très petit nombre d’incidents à travers tout le pays. Que nous étions mobilisés aux cotés de la police haïtienne avec nos unités de police, nos militaires en recours éventuel pour ramener l’ordre si c’était nécessaire. Je crois que la situation sécuritaire dans l’ensemble du territoire d’Haïti est sans comparaison avec ce qu’elle était, il y a 10 ans. On ne parle plus des gangs de Cité Soleil. Mais je l’ai dit tout à l’heure à tous ceux qui seraient tentés de profiter de cette période intermédiaire pour revenir dans l’illégalité, qui voudraient profiter de cette période pour revenir à leurs pratiques illégales - revenir dans l’illégalité, re-commettre des crimes, des violations des droits de l’homme, je leur dis : ça, non ! Nous ne l’accepterons pas.
Radio Télé Galaxie : Monsieur Ladsous, vous avez mentionné dans votre intervention que lors de votre rencontre avec le président de la République, Monsieur Jovenel Moise, vous avez parlé de l’éventuel calendrier de retrait de la MINUSTAH, tout au moins de la composante militaire et du bilan du travail de la MINUSTAH en Haïti. Avez-vous déjà une idée des grandes tendances de ce rapport à soumettre au Conseil de sécurité ?
HL : Sur la première question, je crois pouvoir dire que ce n’est pas à moi de m’exprimer au nom du Président Jovenel Moise. Mais je crois que nous avons eu un très bon entretien dans lequel nous avons parlé de tous ces paramètres, lié à la présence future de la MINUSTAH dans le pays. Nous allons rester en contact, parce que c’est un processus, nous allons gérer dans la transparence et dans la confiance avec nos amis haïtiens, mais je suis très satisfait de la tonalité de cet entretien. Sur les semaines qui viennent, nous allons travailler à préparer les rapports du Secrétaire général qui contiendra ces recommandations. Ces rapports seront rendus publics aux alentours du 17 mars et chacun pourra en prendre conscience, mais je vous ai déjà donné quelques indications.
RFM : Vous avez rencontré les autorités de l’Etat. Vous avez parlé de cette question de l’Etat de droit qui reste une utopie, qui s’aggrave avec la présence de la MINUSTAH, quelle lecture faites-vous ? Quelles sont vos remarques sur cette question de l’Etat de droit qui reste jusqu’à présent dans le noir ?
HL : Je vous laisse la responsabilité du propos sur le fait que l’Etat de droit s’aggrave en Haïti à travers la présence de la MINUSTAH. Je ne peux pas être d’accord avec vous. Je pense le contraire. Ce que je vous ai dit, tout ce que nous avons fait pour former et aider à la formation d’une Police nationale haïtienne professionnelle et efficace : 14,000 policiers qui sont dispersés à travers le territoire national, de plus en plus en profondeur y compris graduellement dans les zones rurales. Je crois que c’est justement un outil puissant pour faire respecter la loi et l’ordre et, cela, les citoyens haïtiens en sont les premiers bénéficiaires. La sécurité après tout, c’est la sécurité des personnes, la sécurité des biens. Nous y travaillons activement mais il est évident qu’il faut faire encore beaucoup plus.
Il faut continuer à accompagner la réforme de l’appareil judiciaire haïtien, il faut accompagner la refonte de toute une série de textes législatifs et règlementaires, il faut surtout aider par tous les moyens à la lutte contre la corruption qui est, je crois l’un des grands freins à l’engagement actif des opérateurs économiques dans le développement du pays, je parle des opérateurs haïtiens mais je parle aussi des opérateurs étrangers. Je constate que l’an dernier, le PIB haïtien n’a progressé que de 0, 8%, cela ne couvre même pas l’augmentation démographique. En réalité que faut-il dans ce pays ? Il faut un véritable développement, une croissance économique, une croissance des échanges, une croissance des emplois et notamment des emplois pour les jeunes et ça, ça ne peut se produire qu’à travers une confiance. Une confiance facilitée par un environnement juridique stable et qui offre aux entreprises un maximum de garantie.
RFI : Monsieur Ladsous avez-vous un commentaire suite aux déclarations du Président américain Donald Trump quant à son projet de couper les financements, de réduire drastiquement les financements des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.
HL : Je n’ai pas de commentaire. Je crois que nous sommes en contact avec la nouvelle administration, nous allons essayer de savoir davantage mais aussi dans un esprit de dialogue. Nous avons des responsabilités importantes, des tâches importantes à accomplir. Tout cela va faire l’objet de discussions très approfondies dans un avenir proche.
Intervention de la porte-parole de la MINUSTAH, Ariane Quentier
Je vous remercie,
A bientôt
Mèsi tout moun
Mèsi anpil