Haïti/Santé: le Sida réduit au point zéro en 2030

2 déc 2015

Haïti/Santé: le Sida réduit au point zéro en 2030

Port au Prince, le 1 decembre 2015  – « Connaitre son statut sérologique, se prendre en charge et surtout, éviter de propager la maladie volontairement » sont, selon Désilia Joseph, au nombre des choix à faire pour vivre mieux et plus longtemps avec le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA). Séropositive depuis plus de 9 ans, cette femme de 40 ans, mère de 3 enfants, a été abandonnée par son époux après qu’elle l’a informé de son état de santé. Scandalisé par l’information, son compagnon a tout bonnement pris la poudre d’escampette.

Comme des centaines de milliers de femmes haïtiennes, Désilia s’est retrouvée, sans autre forme de procès, cheffe de famille monoparentale à 31 ans. « Quand mon époux m’a abandonné, j’étais partagée entre une immense tristesse et un sentiment de soulagement », raconte-elle d’un air lointain. Mais elle s’est relevée rapidement et continue de vivre.

 

Photo : Logan Abassi – UN/MINUSTAH

 

Désilia fait partie des 2.7% de femmes qui connaissent leur séropositivité. Marie José, quinquagénaire, Infectée depuis plus de 19 ans, est aussi l’une des rares victimes à croire que le fait de vivre avec le virus du SIDA n’est plus un drame comme c’était le cas il y a 30 ans.

« L’infection continue de faire des victimes, mais les personnes affectées peuvent continuer à vivre normalement, moyennant qu’elles soient conscientes de leur situation, qu’elles aient le support de leurs proches et ont accès aux traitements appropriés », témoignent Marie José ainsi que d’autres femmes infectées ou affectées par le virus.
 

 

En effet, les résultats obtenus au cours des 15 dernières années en ce qui a trait à la lutte contre cette épidémie à travers le monde sont remarquables. En Juin 2015, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) estimait à 15,8 millions le nombre de personnes ayant accès à la thérapie antirétrovirale ; une évolution par rapport aux 7,5 millions en 2010, et 2,2 millions en 2005.

De 2000 à 2015, les nouvelles infections ont aussi diminué de 35% et le taux de mortalité liée à la maladie a chuté de 42% depuis 2004, selon l’agence onusienne.

Par ailleurs, sur le plan régional, Haïti détient, à elle seule, plus de 50% des PVVIH dans toute la Caraïbe. Le taux de prévalence chez les adultes de 15 à 49 ans est 1,7% chez les hommes contre 2,7% chez les femmes. De même, ce taux chez les jeunes filles de 15 à 24 est 3 fois plus élevé que chez les jeunes hommes de la même tranche d’âge. C’est également en Haïti que le taux de transmission du VIH de la mère à l’enfant reste très élevé, rapporte ONUSIDA.

 

Photo : Logan Abassi – UN/MINUSTAH

 

La violence basée sur le genre, une brèche favorisant la propagation du SIDA

De l’avis des experts, la violence sexuelle et surtout la violence conjugale sont étroitement liées au taux élevé de l’infection au VIH/SIDA chez les femmes et les filles en Haïti. Selon Dr. Françoise Ndayishimiye, responsable a.i. du bureau d’ONUSIDA en Haïti et également conseillère en genre au bureau des droits de l’homme, tout viol peut aboutir à une infection au VIH. De même, une femme, victime de violence conjugale n’est plus en position de décider sur sa sexualité, ni quand aller voir un médecin. « Cette inégalité de genre est donc à la base de la vulnérabilité de la femme vis à vis de la transmission du VIH », souligne Dr. Ndayishimiye.

Certains hommes, n’ont pas caché qu’au cours de leur vie, ils ont eu des relations sexuelles avec au moins 12 partenaires différents, a souligné le médecin. Cela veut dire qu’« on a besoin d’adresser le problème d’inégalité de genre et de sensibiliser les hommes sur la nécessité de prendre leur responsabilité », argumente-t-elle.

 

 

Des efforts mondiaux pour en finir avec le VIH

Nombreux sont les pays qui se sont résolus à doubler l’accès au traitement en faveur des personnes atteintes du SIDA, d’ici à 2020. Ils se conformeront ainsi à « l’approche accélérée » 90-90-90 de l’ONUSIDA qui projette que d’ici à 2020, 90% des PVVIH connaitront leur statut, 90% de celles-ci seront sous traitement antirétroviral et, 90% de ces dernières auront une charge virale indétectable. « C’est une façon de s’assurer que toutes ces personnes restent en bonne santé et que le risque de transmission du VIH soit réduit à un très faible niveau » soutient l’organisme Onusien lors du lancement de sa nouvelle stratégie 90-90-90.

La nouvelle stratégie d’ONUSIDA vise la mise en application de l’objectif de développement durable (ODD)#3 « accès à la santé ». Il s’agit d’accélérer l’élimination de l’épidémie du sida qui est une menace pour la santé publique. Pour se faire, une réponse accélérée et plus ciblée est nécessaire. Ainsi opte-elle pour l’utilisation de meilleures données pouvant aider à cartographier et atteindre les gens partout où se manifestent de nouvelles infections au VIH.

Dans cet esprit, une attention particulière sera accordée à la région Caraïbe, a annoncé le Représentant Spécial Adjoint du Secrétaire Général des Nations Unies en Haïti et également Coordonnateur Humanitaire et Résident Coordonnateur (DSRSG HCRC), Mourad Wahba. Ce qui permettrait dans une certaine mesure de réduire le nombre d’enfants orphelins à cause du SIDA.

 

 

 

« Connaître son statut sérologique », est, selon le Gouvernement Haïtien, ce qui sert de moteur d’accélération pour éliminer le VIH dans ce pays d’ici à 2030. Sur le plan national, le thème de la commémoration de la journée Mondiale du Sida n’a pas changé. Il a plutôt été renforcé : « Zéro nouvelle infection, zéro stigmatisation & discrimination, zéro décès lié au VIH».

SIDA, Mwen Pap Pran, Mwen pap Bay, Mwen Angaje’m.

 

Rédaction : Marie Yolette B. DANIEL