Marie-Yolaine MathieuMarie-Yolaine Mathieu: La présence d’une femme au sein d’un corps professionnel est une garantie

précédent suivant
17 mar 2014

Marie-Yolaine MathieuMarie-Yolaine Mathieu: La présence d’une femme au sein d’un corps professionnel est une garantie

Marie-Yolaine Pierre-Louis Mathieu is one of the few women to hold a senior position within the Haitian police force... Erstwhile head of the women's prison in Petionville - where she was considered by inmates as more like a mother or big sister – Marie-Yolaine is currently in charge of the training centre of the Direction de l’administration pénitentiaire (DAP – or Directorate of Prison Administration,) following a brief stint spent at the sub-directorate of the Department of the West.

Photo: A.Adoum GOULGUE-UN/MINUSTAH Photo: A.Adoum GOULGUE-UN/MINUSTAH

Married at 26 years-of-age, this native of Bainet (South-east) was never content with the traditional status of 'housewife' – a life shared with a man she describes as her "best friend."

"In favour of a reform adopted by President Aristide in 1995, I decided to suspend my studies to enter the prison administration," she explains. The initiative proved successful. She was recruited to the DAP after initial training as a correctional officer, a job also known as a 'prison guard'.
After two years of fieldwork, she continued her training with honours before flying to Ottawa, Canada's capital, where she took part in a three-month intern-ship at the police college.

"At the beginning, the training seemed too harsh for a woman. But the courage of my Canadian friends pushed me to brave all difficulties – and all went well," she laughs. In 2013, following further training, she obtained the rank of Commissioner and entered the exclusive circle of women police commissioners.

Learning discrimination

Marie-Yolaine grew-up in a family where education for all boys and girls was of the highest importance. But other girls her age had less of a chance. "I remember in Jacmel, where I grew up, some of my childhood friends did not attend school. And many of those who were in school, did not complete even primary level," laments the Commissioner.

At the end of primary school, she left the cocoon of the institution run by nuns for mixed classes in a Haitian public high school. This is where she experienced gender stereotypes; "For the boys, we [young women] were less intelligent. They often took the lead in groups and training, and wanted to explain everything as if we could not do it all by ourselves," she recalls.

At work, she never felt particularly discriminated against because of her sex, but notes the paternalistic attitudes of some leaders. "At first, our leaders doubted the ability of women workers to ensure the same work entrusted to men," she said. As proof, "they never gave us armed positions when unaccompanied by a man, while men did such jobs alone."

Equipped with a sense of responsibility and discipline, Marie-Yolaine progressed within the police force and ran Petionville – the only women's prison in the country – for a whole seven years. Despite the difficulties inherent in the job, and managing a tight budget, she feels grateful for the respect shown by the officials of the Haitian National Police. "This lady is correct in everything she does," states an officer of the United Nations Police (UNPol), which works in tandem with women and men under his command.

Advocate for male/female equality

Although unequal stereotypes die hard in Haiti, Commissioner Mathieu is convinced that gender equality is an asset at work and at home. "The presence of a woman in a professional body is a kind of 'guarantee'... At work, woman listen, always trying to understand. At home, I also listen and play host," she explains. "In short, women are more patient than man," she adds. Give women back their chance, she states, to ensure balance and development of society as a whole.

But the fight for equality is far from over. Marie-Yolaine speaks, for example, of abuse of power over women working away from home, or sexual harassment by colleagues or superiors...

This thirst for equality led Marie-Yolaine to perpetuate a culture of non-discrimination learned from her parents, especially for the education of children. She denounces the privilege that some families give to the boy at the expense of the girl when resources are lacking. Even at the age of 44, Marie-Yolaine herself returned to school and studied law and business management to show she can "always do more."

Antoine Adoum GOULGUE

Marie-Yolaine Pierre-Louis Mathieu est l’une des rares femmes haut gradées de la police haïtienne. Longtemps responsable de la prison des femmes à Pétion-Ville où elle est considérée par les détenues plus comme une mère ou une grande-sœur, elle est actuellement responsable du centre de formation de la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP) après un bref séjour à la sous-direction du département de l’Ouest.

Photo: A.Adoum GOULGUE-UN/MINUSTAH Photo: A.Adoum GOULGUE-UN/MINUSTAH

Mariée à 26 ans, cette native de Bainet (Sud-est) ne s’est pas contentée du statut traditionnel de femme au foyer auprès de celui qu’elle qualifie de « meilleur ami ».

« A la faveur d’une réforme décidée par le président Aristide en 1995, j’ai décidé de suspendre mes études pour intégrer l’administration pénitentiaire », explique-t-elle. L’initiative se révèle concluante. Elle est recrutée à la DAP après une formation initiale comme agent correctionnel, autrement dit garde de prison.

Après deux ans de travail sur le terrain, elle poursuit sa formation et termine major de sa promotion avant de s’envoler pour Ottawa, la capitale canadienne, où elle effectue un stage de trois mois au Collège du personnel.

« Au début, la formation me paraissait trop rude pour une femme. Mais le courage de mes camarades canadiennes m’a poussé à braver toutes les difficultés et tout s’est bien passé », rie-t-elle. En 2013, elle obtient à l’issue d’une autre formation le grade de commissaire et entre dans le cercle restreint des femmes commissaires de police.

L’apprentissage de la discrimination

Marie-Yolaine a grandi dans une famille où l’éducation pour tous, filles et garçons, était primordiale. Mais d’autres filles de son âge n’ont pas eu sa chance. « Je me souviens qu’à Jacmel où j’ai grandi certaines de mes camarades d’enfance n’ont pas été à l’école. Et celles qui étaient à l’école n’ont pas terminé leurs études primaires », regrette la commissaire.

A la fin du collège, elle quitte le cocon de l’école des sœurs pour la mixité des classes dans un lycée public haïtien. C’est là qu’elle subit les stéréotypes liés au genre. « Pour les garçons, nous étions moins intelligentes qu’eux. Ils prenaient souvent la tête des groupes d’entraînement et voulaient tout nous expliquer comme si nous ne pouvions pas y arriver par nous-mêmes », se souvient-elle.

Au travail, elle ne se sent pas vraiment discriminée à cause de son sexe, mais remarque les attitudes paternalistes de certains chefs. « Au début, nos chefs doutaient de la capacité des agents femmes à assurer le même travail confié aux hommes », dit-elle.

Pour preuve, « ils ne nous affectaient jamais à un poste armé sans être accompagnées d’un homme alors que les hommes faisaient la garde seuls ».

Armée d’un sens aigu des responsabilités et de la rigueur, elle progresse dans la police et dirige pendant sept ans l’unique prison de femmes du pays, à Petion-Ville.

Malgré les difficultés inhérentes à sa tâche et la gestion d’un budget serré, elle s’estime reconnaissante du respect montré par les responsables de la Police Nationale. « Cette dame est correcte dans tout ce qu’elle fait », renchérit un agent de la Police des Nations Unies (UNPol), qui travaille en tandem avec les femmes et hommes sous ses ordres.

Défenseur de l’égalité femme/homme

Contrairement à des stéréotypes inégalitaires qui ont la vie dure en Haïti, le commissaire Mathieu est convaincue que l’égalité des sexes est un atout au travail comme au foyer.

« La présence d’une femme au sein d’un corps professionnel est une garantie. Au travail, la femme écoute, cherche à comprendre ; au foyer, elle écoute et accueille », explique-t-elle. « En bref, la femme est plus patiente que l’homme », résume-t-elle. Donner aux femmes leurs chances revient, selon elle, à garantir l’équilibre et l’épanouissement de toute la société.

Mais la lutte pour l’égalité est loin d’être gagnée. Elle parle par exemple de cas d’abus de pouvoir sur des femmes travaillant loin de leur foyer, ou de harcèlement sexuel par des collègues ou des supérieurs hiérarchiques.

Cette soif d’égalité la pousse à perpétuer cette culture de non-discrimination apprise de ses parents, notamment pour l’éducation des enfants. Elle dénonce ainsi le privilège que certaines familles accordent au garçon au détriment de la fille lorsque les ressources viennent à manquer.

Et justement, pourquoi se priver ? A 44 ans, elle renoue avec les études et étudie le droit et la gestion des affaires pour montrer qu’elle peut faire « toujours plus ».

Antoine Adoum GOULGUE