Compte-rendu de la réunion du Conseil de sécurité sur Haïti

8 mar 2012

Compte-rendu de la réunion du Conseil de sécurité sur Haïti


Département de l'information - Service des informations et des accréditations - New York

08 mars 2012

6732e séance - matin

CS/10572

Soulignant les efforts déployés dans les domaines de la reconstruction et de la sécurité depuis le tremblement de terre du 12 janvier 2010, nombre des 25 délégations qui se sont exprimées, ce matin, lors d’un débat du Conseil de sécurité consacré à Haïti, se sont déclarées inquiètes de l’affrontement constant entre l’exécutif et le législatif, ainsi que des tensions au sein de l’exécutif, qui ont conduit à la démission, le 24 février dernier, du Premier Ministre Garry Conille, après seulement quatre mois d’exercice du pouvoir.

Trois semaines après la mission qu’il a menée dans le pays, du 13 au 16 février, le Conseil de sécurité avait au préalable entendu un exposé du Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), M. Mariano Fernandez.

De nombreuses délégations ont exhorté le Gouvernement à prendre en main le processus de relèvement et de développement d’Haïti, jugeant nécessaires des mesures difficiles pour éviter que le manque de volonté politique et la résistance profonde à la réforme en Haïti ne continuent d’entraver l’essor du pays.

Considérant que les troubles politiques sont responsables d’une chute de 4% d’une croissance 2011 initialement estimée à 11%, le Représentant spécial, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général sur la MINUSTAH, a invité les acteurs politiques à s’unir, afin que les prévisions de 8% pour 2012 soient atteintes.

Les délégués ont, pour leur part, tous souhaité, dans l’intérêt supérieur du peuple haïtien, que la nomination du nouveau premier ministre, M. Laurent Lamothe, soit avalisée.

Le représentant de la Chine a estimé que la réconciliation était la clef pour maintenir la paix et la stabilité et a exhorté le Gouvernement à prendre ses responsabilités, afin, notamment de promouvoir l’état de droit et de renforcer les institutions nationales, pour attirer des investisseurs et créer des emplois.

Dans le même esprit, le délégué de l’Inde a jugé que la réconciliation politique était une priorité pour mettre sur pied une administration efficace qui saurait promouvoir un développement économique et sociale.

Illustrant la fragilité de la situation économique et sociale, le Chef de la MINUSTAH a rappelé que 8 millions d’Haïtiens sur 10 vivaient sans électricité et avec moins de deux dollars par jour, alors que moins de 200 000 personnes, sur une population active de 4,2 millions, disposent d’un emploi stable. Il a aussi noté que 515 000 déplacés n’avaient toujours pas pu être relogés.

Dans le domaine de l’appropriation par les autorités nationales et du retrait futur de la MINUSTAH, les représentants de la France et des États-Unis ont estimé prioritaire de consacrer à la Police nationale d’Haïti (PNH) les moyens de prendre en charge progressivement la sécurité du pays, appelant la Mission à évoluer de manière graduelle et responsable vers un départ dans les meilleures conditions.

Si le représentant du Pakistan a affirmé que le retrait progressif de la MINUSTAH devait s’accompagner de progrès positifs et réels sur le terrain, celui de l’Inde a ajouté que la restructuration de la Mission devait être basée sur l’amélioration générale de la situation sécuritaire et la stabilisation de la situation économique et politique.

Réagissant à de nombreux appels exhortant Haïti à s’approprier la reconstruction, le représentant d’Haïti a espéré que ce retrait se ferait de concert avec son gouvernement, lorsque la communauté internationale aura constaté que la PNH et le pouvoir judiciaire auront atteint la maturité voulue pour faire avancer le pays et lorsque le développement aura été enclenché.

Dans ce contexte, le Chef de la MINUSTAH a annoncé la formation de 6 000 policiers supplémentaires d’ici à 2016 qui s’ajouteront aux 10 000 policiers en fonction, qui demeurent insuffisants actuellement pour assurer la sécurité de 10 millions d’habitants, alors que des anciens militaires viennent de défier le nouveau Gouvernement en prenant possession de casernes.

Plusieurs orateurs ont également appelé à la mise en œuvre d’une politique de tolérance zéro concernant d’éventuels abus que pourraient commettre des agents de maintien de la paix. Le représentant de l’Uruguay a indiqué que son pays avait donné suite à un cas grave d’abus sexuels en saisissant sa justice pénale qui examine l’affaire en coopération durable avec les autorités haïtiennes et le Secrétariat de l’ONU dans le souci de rendre justice en toute régularité.

* S/2012/128

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

Rapport du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (S/2012/128)

Le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, rend compte des principaux événements survenus en Haïti entre le 25 août 2011, date de la parution de son dernier rapport (S/2011/540), et le 28 février 2012, et décrit les activités de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation dans le pays (MINUSTAH).

Le Secrétaire général souligne que l’affrontement constant entre l’exécutif et le législatif ainsi que les tensions au sein de l’exécutif montrent que les dirigeants politiques haïtiens ont gravement failli à la responsabilité qui leur incombe de satisfaire les aspirations légitimes de ceux qui les ont élus et d’assurer à Haïti un gouvernement efficace à un moment où le pays a des besoins sans précédent.

Il incombe aux pouvoirs exécutif et législatif haïtiens d’agir dans l’intérêt supérieur du peuple haïtien et de nommer rapidement un nouveau premier ministre, écrit M. Ban.  Il les encourage à collaborer afin d’éviter, par tous les moyens possibles, les récents différends qui ont empêché de progresser sur la voie du renforcement et de la réforme des institutions de gouvernance d’Haïti.

À cet égard, le Secrétaire général appuie fermement l’appel lancé par les membres du Conseil de sécurité lors de leur récente visite en Haïti afin qu’ils travaillent ensemble dans un esprit de compromis.  Il encourage tous les acteurs à engager un dialogue politique constructif afin de parvenir à un accord politique et à la réconciliation sur la base de la tolérance mutuelle.

Un dialogue véritable sans exclusive est, selon lui, la condition préalable pour faire des progrès notables dans les domaines du relèvement et du développement, des élections, de la réforme constitutionnelle, de l’état de droit, de la protection des droits de l’homme et de la création d’une culture où l’impunité n’est pas tolérée.

Le Secrétaire général dit espérer que les autorités haïtiennes relanceront bientôt le processus électoral en vue de la tenue des prochaines élections législatives, municipales et locales partielles et qu’elles mettront en place un Conseil électoral crédible, ce qui contribuera à redynamiser les institutions haïtiennes et à atténuer le vide institutionnel lorsque le mandat de 10 sénateurs arrivera à expiration le 8 mai 2012.

Il importe tout particulièrement que le Gouvernement mobilise les ressources nécessaires pour doter le conseil électoral de moyens administratifs et de gestion électorale, ajoute-t-il, notant que la MINUSTAH est disposée à appuyer le processus électoral, comme elle l’a fait dans le passé, et à coordonner l’assistance électorale internationale à Haïti en coopération avec les autres parties prenantes internationales.

M. Ban souligne que les autorités haïtiennes doivent de plus en plus assumer la responsabilité de la stabilité de leur pays, ce qui suppose une plus grande présence de l’État sur toute l’étendue du territoire national incarnée par la Police nationale, un appareil judiciaire fonctionnel et une administration publique performante.

Il s’agit également de promouvoir l’éducation et de fournir les services de base, un logement et une protection aux personnes qui sont toujours déplacées du fait du séisme.

Le Gouvernement et le Parlement doivent saisir l’occasion offerte par ce vif intérêt de la communauté internationale pour renforcer l’état de droit et mettre en place les institutions fortes et plus stables, les droits de propriété fiables et les garanties juridiques qu’exige l’investissement étranger, affirme le Secrétaire général, qui invite en outre le nouveau Gouvernement à prendre en main le processus de relèvement et de développement d’Haïti.

Déclarations

M. MARIANO FERNANDEZ, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), a présenté des chiffres qui résument la situation sociale qui prévaut en Haïti.  Il a notamment relevé que 8 millions d’Haïtiens, sur une population de 10 millions, vivaient sans électricité.  De plus, 8 Haïtiens sur 10 vivent avec moins de deux dollars par jour, tandis que 2% de la population contrôle 69% des richesses du pays.  En outre, sur une population active estimée à 4,2 millions de personnes, moins de 200 000 personnes disposent d’un emploi stable, a révélé M. Fernandez.

Le Représentant spécial a regretté la démission récente du Premier Ministre d’Haïti, M. Garry Conille.  Il a noté que cet événement témoignait de la situation du pays en matière de gouvernance, laquelle contribue à saper les progrès dans la mise en route de la démocratie.  Il a, dans ce contexte de crise, invité les autorités haïtiennes à travailler avec toutes les composantes de la société haïtienne, syndicats, partis politiques et organisations de la société civile.  Il s’est félicité de certaines avancées, notamment la mise en place de la Cour de cassation haïtienne, après cinq ans de procédure.  Il a salué ce progrès majeur et a indiqué que la MINUSTAH avait permis la construction de 50 tribunaux de paix, et une trentaine de plus sont en projet.

Au sujet de la sécurité, il a indiqué qu’au cours des six derniers mois, la police de la MINUSTAH et la police locale avaient mené 21 000 patrouilles conjointes, et qu’elles avaient pris des mesures pour démanteler plusieurs bandes criminelles, des actions ayant permis de diminuer le taux de criminalité dans le pays.  Pas moins de 10 000 agents de la police haïtienne sont en activité, a-t-il dit, un chiffre qui représente le triple des effectifs que le pays avait en 2004, mais qui reste insuffisant pour assurer la sécurité de 10 millions d’habitants.

M. Fernandez a annoncé la formation de 6 000 policiers supplémentaires à l’horizon de 2016, année de fin de mandat du Président Michel Martelly.  Le Représentant spécial a expliqué que la violence politique a pratiquement disparu dans le pays, et le taux d’homicide est appréciable, en comparaison avec les chiffres des pays voisins.  En ce 8 mars, marquant la Journée internationale de la femme, M. Fernandez a émis le vœu de voir la femme haïtienne avoir plus de place dans la société, et il a regretté qu’elle soit la principale victime d’une violence conjugale en hausse dans le pays.

Abordant la question de la remise en activité de l’armée haïtienne, il a précisé que la communauté internationale ne semblait pas disposée à soutenir ce projet du Président Martelly.  Il a relevé que des élections seraient organisées en novembre prochain afin de renouveler les représentants du peuple.  Il a en outre regretté que les prévisions de croissance, de l’ordre de 11% pour 2011, aient baissé à 4%.  Il a expliqué que cette situation s’expliquait par les troubles d’ordre politique, et il a invité les différents acteurs politiques nationaux à s’unir, afin que les prévisions de croissance de 8% pour 2012 puissent être atteintes.

Sur la question des droits de l’homme, M. Fernandez a souhaité l’amélioration des procédures judiciaires afin que des prévenus ne passent plus des années à attendre leur jugement.  Il a également évoqué la situation des prisons vétustes et le problème des déplacés, au nombre de 515 000, qui n’ont pas toujours pu se reloger depuis le séisme de janvier 2010.  Il a ensuite regretté que le capital sympathie de la MINUSTAH se soit érodé du fait de certaines actes répréhensibles.  Pour terminer, il a souhaité que les pouvoirs exécutif et législatif d’Haïti puissent travailler en synergie, avec l’aide de la communauté internationale, pour la reconstruction du pays et le bien-être de la population haïtienne.

Mme SUSAN RICE (États-Unis) a regretté le manque de volonté politique en Haïti, même si la démocratie et la sécurité ont été renforcées depuis deux ans.  Elle a dit que les programmes économiques et sociaux avaient besoin d’une direction politique d’un gouvernement fonctionnel.  Elle a souligné l’importance des prochaines élections législatives, municipales et locales partielles qui seront l’occasion de renouveler un tiers du Sénat et de trouver plusieurs membres du Gouvernement.  Face aux nombreux défis, la représentante des États-Unis a jugé que la définition des forces de la MINUSTAH devait être basée sur les réalités du terrain et la capacité de la police haïtienne à prendre en main la question de la sécurité.

Mme Rice a estimé que la prochaine adoption du budget national devait être une occasion d’engager des ressources suffisantes pour permettre à la police haïtienne de disposer des moyens et forces nécessaires en vue de prendre en charge la sécurité du pays.  Elle a exhorté le Parlement et l’exécutif à accorder ces moyens nécessaires à la police haïtienne en mettant l’accent sur le développement des institutions de l’état de droit, dont les prisons et les tribunaux.  Notant que les frictions politiques et la faiblesse de l’état de droit décourageaient les investisseurs, elle a appelé à une réforme qui démontre qu’Haïti est prête à s’ouvrir vers l’extérieur pour créer des emplois.  Tout en reconnaissant la qualité du travail réalisé par la MINUSTAH dans des conditions les plus difficiles, la représentante des États-Unis a dénoncé la persistance de cas d’abus et d’exploitation sexuels par des membres de la Mission.

M. AGSHIN MEHDIYEV (Azerbaïdjan) a déclaré que la récente mission du Conseil de sécurité en Haïti avait montré que les autorités nationales et la communauté internationale devaient faire davantage dans l’intérêt du peuple haïtien.  Il a exhorté tous les acteurs politiques à engager un dialogue politique constructif afin de régler leurs différends dans un esprit de compromis.  Il a encouragé la MINUSTAH à faciliter le dialogue politique entre les branches du Gouvernement et les acteurs politiques clefs et à soutenir le processus électoral en cours.

Tout en se félicitant de l’amélioration de la sécurité policière, dont la diminution de la violence politique, il a dit que la persistance d’un haut niveau d’insécurité était particulièrement inquiétante.  La coopération étroite entre la Police nationale d’Haïti et la MINUSTAH est essentielle pour assurer que cette Police nationale soit capable d’assurer ses fonctions.  Alors que, selon lui, plus d’un million d’Haïtiens vivent encore dans des camps, un engagement international solide est essentiel pour faire en sorte que tous les besoins humanitaires urgents soient assurés, a-t-il insisté.  Cela ne dispense pas le Gouvernement national de prendre ses responsabilités en assurant des services de base aux plus démunis, a insisté le représentant de l’Azerbaïdjan.

M. MARTIN BRIENS (France) a assuré que la France était déterminée à tenir les engagements pris par son Président à l’égard d’Haïti, qui s’élèvent à 326 millions d’euros, avec sa part de l’aide européenne.  Près des trois quarts de l’aide bilatérale ont été décaissés pour financer nos priorités communes, a-t-il dit.  Il a constaté cependant que les fortes tensions actuelles empêchaient le fonctionnement régulier des institutions haïtiennes.  Des progrès ont pourtant été enregistrés sur ce plan, a-t-il remarqué, mentionnant la Police nationale, qui est de plus en plus visible et respectée, et la condamnation en justice des responsables de la tuerie intervenue dans la prison des Cayes en janvier 2010.  M. Briens a expliqué que la communauté internationale avait besoin de stabilité politique pour pouvoir poursuivre son effort en faveur de la stabilisation et de la reconstruction, de même que les investisseurs étrangers que le Président souhaite attirer.

Appelant les autorités haïtiennes à assumer les responsabilités, il les a invitées à fixer une date pour les élections locales et législatives partielles, à voter le budget, à promulguer rapidement les amendements constitutionnels avec des garanties pour le Président, à mettre en place un conseil électoral permanent et à respecter une trêve entre l’exécutif et le législatif.  Il a également appelé le Président à prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les rassemblements d’hommes armés se réclamant des anciennes Forces armées d’Haïti.  En ce qui concerne la MINUSTAH, M. Briens a rappelé qu’elle n’avait pas vocation à rester indéfiniment en Haïti.  Il a souhaité que l’on poursuive l’augmentation de ses effectifs, comme décidé en 2010, en tenant compte des conditions sur le terrain et en se concentrant sur la formation de la police et le renforcement de l’état de droit.  La MINUSTAH doit évoluer de manière graduelle et responsable vers un départ dans de bonnes conditions, a-t-il conclu.

M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a rappelé que la visite du Conseil de sécurité en Haïti visait à apporter son soutien au peuple haïtien dans la perspective du développement et de l’établissement de l’état de droit.  Il s’est dit préoccupé par l’annonce du Programme alimentaire mondial (PAM), qui prévoit en juin prochain de mettre fin à son programme de distribution de repas scolaires.  Il a souhaité que la communauté internationale se mobilise pour que ce programme puisse continuer, car, a expliqué M. Osorio, il permet aux enfants de bénéficier d’au moins un repas par jour, et les incite à se rendre à l’école.

Au sujet de l’image écornée de la MINUSTAH en Haïti, le représentant a mis l’accent sur la politique de tolérance zéro dans les missions de maintien de la paix.  En outre, il a reconnu le droit des dirigeants d’Haïti à vouloir se doter d’une armée nationale.  Il a regretté, par ailleurs, l’absence d’un cadre institutionnel permettant au système judiciaire de pouvoir pleinement jouer son rôle.  Il a également rappelé que le pays gardait encore les stigmates du séisme qui a touché le pays en 2010, et il a appelé la communauté internationale à continuer d’apporter son soutien pour la reconstruction d’Haïti.

M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) s’est dit convaincu que la récente nomination d’un nouveau premier ministre, en la personne de M. Laurent Lamothe, contribuera à assurer une meilleure cohérence de l’action gouvernementale et à réaliser un consensus national autour des grandes réformes attendues.  Il a salué les efforts des autorités haïtiennes et leur détermination à parachever les réformes en cours, notamment celles concernant le Conseil électoral permanent, la Cour suprême et la signature du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.  Il a salué tout particulièrement l’amélioration de la situation sécuritaire et la contribution décisive apportée par la MINUSTAH au maintien d’un environnement stable ainsi qu’au renforcement des capacités de la Police nationale haïtienne.

S’agissant du processus de relèvement et de développement, M. Loulichki a salué les efforts de reconstruction réalisés par le Gouvernement ainsi que par la MINUSTAH, en notant les avancées notables obtenues en matière de déblaiement, de reconstruction d’écoles et de relogement.  Il a félicité le Gouvernement haïtien, qui, avec l’aide des agences onusiennes, a initié le programme 16/6, un projet pilote intégré qui, au-delà de la problématique du relogement, prend également en compte l’accès aux services de base et la création d’activités génératrices de revenus.  Mettant l’accent sur la problématique de l’emploi, en particulier des jeunes, il s’est félicité de certaines initiatives comme la création de zones industrielles.  De plus, il a estimé que les réformes entamées pour faciliter et encourager les investissements étrangers allaient dans le bon sens.  Il a dit la volonté du Maroc d’assister le Gouvernement haïtien dans ses efforts de réforme aussi bien au niveau institutionnel qu’au niveau de la consolidation de l’état de droit, notamment en matière de droits de l’homme.

M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a rappelé les enjeux qui se présentent au peuple haïtien, notamment en matière de sécurité, de renforcement de l’état de droit et économique.  Il a considéré que la construction de la démocratie en Haïti était une tâche difficile dans un contexte économique déplorable et d’insécurité.  Il a souhaité que la stabilité politique puisse prévaloir afin que le pays soit en mesure de faire face à ces défis importants.  Il a, dans ce contexte, regretté la démission du Premier Ministre haïtien dont le départ, a-t-il expliqué, a créé une situation d’instabilité politique préjudiciable à la gestion des affaires publiques.

Au sujet de la sécurité, le représentant a estimé que la MINUSTAH devait continuer de jouer un rôle majeur en attendant que la police haïtienne prenne le relais.  Il a, de même, appelé le Gouvernement d’Haïti à reconsidérer sa décision de former une armée nationale, une initiative qui, selon lui, ne semble pas de première urgence dans un contexte de pauvreté et de nombreux défis sociaux.  Il a en outre regretté le dénigrement dont la MINUSTAH fait l’objet au sein de l’opinion haïtienne, et a souhaité que la Mission soit soutenue par le Conseil de sécurité et la communauté internationale, car elle rend de fiers services au peuple haïtien, a-t-il noté.

M. GERT ROSENTHAL (Guatemala) a rappelé que son pays contribuait depuis longtemps aux efforts de la communauté internationale à travers notamment la MINUSTAH.  Il a noté que la plus importante chose à faire en Haïti était de rétablir la stabilité politique.  Il y avait de l’espoir en début d’année mais cet optimisme s’est évaporé suite aux querelles incessantes entre l’exécutif et le législatif, a-t-il déploré.  Cette situation a des impacts sur la prise de décisions sur des questions clefs, a souligné le représentant.  S’agissant des élections, il a dit que le statut temporaire du Conseil électoral n’était pas de nature à lui donner le savoir-faire et la capacité technique nécessaires pour les futures élections.  Il a alors suggéré la mise en place d’un secrétariat permanent à cet effet.  Il a ensuite évoqué les efforts de reconstruction et de rétablissement du pays en signalant l’importance du renouvellement du mandat de la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti qui avait expiré en octobre dernier.  À ce sujet, il a déclaré que le Gouvernement avait un rôle à jouer.

Le représentant haïtien a également fait état des personnes déplacées dans le pays, soulignant qu’il appréciait la réduction de 19% du total des personnes dans les camps.  Il a mis l’accent sur la nécessité de faire davantage et de trouver des abris alternatifs et des sites d’accueil sur le long terme.  M. Rosenthal a par ailleurs estimé que les acquis en matière de sécurité restaient déterminés par le développement économique et la bonne gestion de l’État.  Il a pris note de l’engagement du Gouvernement vis-à-vis des anciens membres de l’armée haïtienne qui avaient pris l’initiative de se regrouper et de se réorganiser sans l’accord du Gouvernement.

M. DOCTOR MASHABANE (Afrique du Sud) a salué les progrès politiques accomplis, en octobre 2011, qui ont mené à l’instauration d’un nouveau Gouvernement.  Cependant, les tensions qui ont suivi ont conduit à la démission du Premier Ministre Garry Conille, quatre mois après son entrée en fonctions, a-t-il ajouté.  Il a cependant considéré que cette démission ne devait pas empêcher le processus politique d’aller de l’avant et a exprimé l’espoir que les Haïtiens parviennent à un consensus sur toutes les questions encore en suspens.  « Une gouvernance stable est indispensable aux Haïtiens pour guider les efforts de reconstruction de leur pays », a-t-il déclaré.  Rappelant que le Conseil de sécurité avait, à plusieurs reprises, reconnu combien les défis auxquels était confronté Haïti étaient liés entre eux, il a réaffirmé à quel point la sécurité, la remise sur pied des institutions dans l’optique du renforcement de l’état de droit, de la consolidation des structures nationales, du développement et de la démocratie étaient des éléments se renforçant mutuellement.  « La promotion de l’état de droit à tous les niveaux est un élément critique pour assurer la stabilité et faciliter le développement », a-t-il poursuivi.

Dans ce contexte, il a salué la nomination par le Président Michel Joseph Martelly des Président et Vice-Président de la Cour suprême.  Soulignant encore qu’Haïti demeurait confronté à des défis humanitaires de taille, il a invité la communauté internationale à augmenter son assistance en vue de lutter contre l’épidémie de choléra et d’assurer la sécurité alimentaire.  M. Mashabane a ensuite réaffirmé le soutien de son pays aux Haïtiens.  Outre son assistance bilatérale, il a indiqué que l’Afrique du Sud continuerait aussi d’apporter son aide par le biais du Dispositif IBAS (Inde, Brésil, Afrique du Sud) pour l’atténuation de la pauvreté et la lutte contre la faim.

M. MIGUEL BERGER (Allemagne) a indiqué que son pays avait donné 146 millions d’euros à Haïti au titre de l’aide bilatérale pour la reconstruction, 41 millions d’euros pour l’assistance humanitaire, auxquels s’ajoutent 230 millions d’euros de dons privés.  L’Allemagne reste préoccupée par les tensions entre les pouvoirs exécutif et législatif, a-t-il poursuivi.  Un nouveau premier ministre accepté par tous doit être nommé rapidement, a-t-il ajouté.  Il a pris acte de l’évaluation faite par le Secrétaire général selon laquelle la Police nationale d’Haïti (PNH) n’était pas encore en mesure d’assumer entièrement la responsabilité de la sécurité intérieure.  La MINUSTAH doit être renforcée, a insisté le représentant.  Il a ajouté que les efforts pour renforcer la PNH ne sauraient être dilués dans les plans visant à réintégrer les forces armées haïtiennes.

Pour ce qui concerne les élections, l’Allemagne presse aussi les acteurs politiques à éviter le vide constitutionnel conformément aux discussions du 1er mars à Port-au-Prince.  Elle encourage les autorités à inviter les observateurs internationaux à superviser ces élections.  Elle appelle également les autorités haïtiennes à combattre l’impunité.  Elle rappelle que l’établissement de la bonne gouvernance et de l’état de droit demeurent des garanties du succès.  Le représentant de l’Allemagne a aussi souligné l’importance de la politique de tolérance zéro contre la mauvaise conduite de certains membres du personnel des Nations Unies.  Pour lui, il est évident que l’agenda de la MINUSTAH mérite des ajustements, une rationalisation et doit se concentrer sur le développement sur le terrain.

M. LI BAODONG (Chine) s’est félicité de progrès évidents réalisés en Haïti tout en soulignant les nombreux défis pour assurer la stabilité et promouvoir le développement.  Il a dit que la situation d’Haïti exigeait de nouveaux efforts concertés entre le Gouvernement haïtien et la communauté internationale.  Le représentant de la Chine a estimé que la réconciliation était la clef pour maintenir la paix et la stabilité.  Il a exhorté le Gouvernement à prendre ses responsabilités en faisant le nécessaire pour attirer des investisseurs et créer des emplois.  Il a jugé indispensable d’avancer dans le domaine du processus politique afin de promouvoir l’état de droit et de renforcer les institutions nationales.

M. NIKITA Y. ZHUKOV (Fédération de Russie) a regretté la démission du Premier Ministre haïtien.  Il a estimé que la mission du Conseil de sécurité en Haïti avait été riche d’enseignements.  Il a également reconnu que cette situation d’instabilité politique contribuait à freiner un éventuel redémarrage économique.  Au sujet de la volonté des autorités haïtiennes à vouloir remettre sur pied l’armée du pays, le représentant a reconnu que ce sont les autorités nationales qui doivent prendre cette décision de manière souveraine.  Selon lui, cet objectif ne constitue pas une urgence car, a-t-il expliqué, des forces extérieures ne semblent pas menacer la stabilité du pays.  Il a ensuite salué l’action de la MINUSTAH et a souhaité que la communauté internationale continue d’appuyer les autorités haïtiennes afin qu’elles puissent faire face à leurs nombreux défis.

M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a relevé les progrès qu’Haïti a réalisés en matière de reconstruction malgré les incertitudes politiques et l’instabilité.  Il a retenu les chiffres du Fonds monétaire international (FMI) dont une croissance du PIB positive en 2012.  Il a regretté que les querelles intestines et les différends politiques aient empêché l’adoption de toute une série de lois importantes et la programmation des futures élections partielles.  La réconciliation politique est une priorité pour mettre sur pied une administration efficace qui saura promouvoir le développement économique et social dont le pays a besoin, a encouragé le représentant.  Il a souligné, dans ce contexte, le rôle essentiel de la MINUSTAH, en attendant que les institutions nationales reprennent le flambeau.

La restructuration de la MINUSTAH doit, selon le représentant, se baser sur  l’amélioration générale de la situation en matière de sécurité et la stabilisation économique et politique.  Il a rappelé que l’Inde a accordé 5 millions de dollars d’aide à Haïti pour le relèvement.  Le soutien de la communauté internationale et une gouvernance stable sont les éléments essentiels de la relance d’Haïti, a-t-il insisté.

M. KODJO MENAN (Togo) a relevé que la reconstruction d’Haïti était sur la bonne voie, grâce aux actions du Gouvernement, de la population et du soutien de la communauté internationale.  Il a cependant fait part de ses inquiétudes concernant la situation politique du pays, notamment avec la démission du Premier Ministre du pays, quatre mois après sa prise de fonctions.  Le représentant a appelé les dirigeants politiques haïtiens à privilégier le compromis et le consensus afin de sortir de cette impasse.

M. Menan s’est félicité de la baisse générale de l’insécurité en Haïti, et il a également salué le rôle de la MINUSTAH dans la lutte contre l’insécurité.  Au sujet de la situation humanitaire dans le pays, il a souhaité que des actions supplémentaires soient menées pour mettre fin au choléra et résoudre la question des personnes déplacées.  « Aider Haïti à se reconstruire, c’est assurer la paix dans ce pays et dans toute la région », a-t-il estimé.  Par ailleurs, il a jugé que si la communauté internationale avait un rôle à jouer pour la reconstruction du pays, cette tâche incombait en premier lieu aux Haïtiens eux-mêmes.

M. ABDULLAH HUSSAIN HAROON (Pakistan) a estimé que si le renforcement de la Police nationale est indispensable, il faut aussi un système judiciaire plus solide.  Il a prôné une politique de tolérance zéro contre les abus imputés au personnel de la Mission de maintien de la paix.  Les abus sexuels sont une question grave pour laquelle il ne saurait y avoir aucun compromis, a insisté le représentant. Nous devons, a-t-il insisté, présenter des excuses et, par ailleurs, contribuer réellement à résoudre le problème du choléra, en affectant plus de moyens.  Le représentant s’est aussi dit inquiet quant à la perspective de voir l’absence d’un consensus national éroder les acquis dans le domaine de la sécurité.  Le retrait progressif de la MINUSTAH doit s’accompagner de progrès réels sur le terrain, a-t-il tranché.

M. PHILIP PARHAM (Royaume-Uni) a reconnu que la MINUSTAH se trouvait dans une situation particulièrement délicate.  D’un côté, son rôle est reconnu et salué par la communauté internationale, alors que, dans le même temps, les Haïtiens de tous bords demandent de plus en plus le départ de la Mission.  Il a souligné que les scandales qui avaient marqué les activités de la MINUSTAH sur le terrain ne jouaient pas en sa faveur.  Le représentant a estimé que le moment était venu de garantir la sécurité en Haïti avant le départ de la MINUSTAH.  Pour cela, a-t-il suggéré, il faudrait renforcer les capacités de la Police nationale d’Haïti afin qu’elle puisse prendre le relais des missions de sécurité après le départ de la MINUSTAH.  Il a souhaité en outre que des efforts soient accrus afin de renforcer la stabilité politique dans le pays et d’établir l’état de droit.  Il a souligné que ce sont les conditions du terrain qui devraient définir le calendrier de retrait de la MINUSTAH, afin que ce départ ne puisse pas conduire à l’instabilité en Haïti.

M. JEAN WESLEY CAZEAU (Haïti) a déclaré que les parlementaires haïtiens étaient conscients de leurs responsabilités et comprendront l’urgence de procéder aux ratifications nécessaires pour doter Haïti d’un nouveau premier ministre, M. Laurent Lamothe, dans un délai raisonnable pourvu qu’il réponde aux exigences de la Constitution et des lois du pays.  Il a dit que la situation sécuritaire avait connu une certaine amélioration due en grande partie à une meilleure coordination sans cesse accrue entre la Police nationale et la MINUSTAH.  Il a jugé opportun que le renforcement des capacités et de la formation de la PNH s’accélèrent pour que, le moment venu, elle soit prête à assurer ses responsabilités et être un vrai agent multiplicateur de changements et de développement, en résumé une police professionnelle.  Citant le cas d’anciens militaires ayant pris possession d’anciennes casernes, il a dit que le Président avait lancé plusieurs appels en privilégiant une solution pacifique négociée pour amener ces militaires à rentrer chez eux.

Alors que 500 000 personnes vivent encore sous des tentes, il a appelé la communauté internationale à soutenir les efforts du Gouvernement en matière de relogement décent et digne.  Face aux restrictions budgétaires qui limiteront à l’avenir les interventions de certaines organisations comme le Programme alimentaire mondial (PAM), le représentant d’Haïti a exhorté les amis d’Haïti et les donateurs à penser à ces organismes qui, sans tambour ni trompette, sont les plus talentueux représentants de la communauté internationale sur le terrain.  Il a dit sa reconnaissance pour l’assistance reçue de la part de la MINUSTAH en se disant conscient que les plans de retrait progressif sont déjà dans les tiroirs.  Il a espéré que ce retrait se fera en étroite collaboration avec le Gouvernement haïtien, lorsque la communauté internationale aura constaté que la PNH et le pouvoir judiciaire haïtien auront atteint la maturité voulue pour faire avancer le pays et lorsque que le développement sera enclenché.

Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a encouragé les autorités haïtiennes à apaiser les tensions, à permettre la nomination d’un nouveau premier ministre et l’organisation des élections législatives pour mieux asseoir la démocratie.  La représentante a salué les mesures prises par le Président Michel Joseph Martelly concernant les anciens membres de l’armée haïtienne qui avaient pris l’initiative de se réorganiser.  Le renforcement de la Police nationale d’Haïti permettra d’assurer la sécurité avec l’appui de la MINUSTAH, a-t-elle dit.

Elle a réitéré le fait que la promotion du développement ne saurait être dissociée du respect de la souveraineté du pays.  « Nous nous félicitons que durant la visite du Conseil en Haïti, celui-ci ait noté l’incompatibilité de la pauvreté avec la stabilité à long terme du pays », a souligné la représentante.  Elle a indiqué qu’au cours de sa visite en Haïti le mois dernier, la Présidente brésilienne, Mme Dilma Rousseff, avait réaffirmé la solidarité de son pays à l’égard d’Haïti où de nombreux projets sont financés par le Brésil.  Le montant de ces investissements est de 40 millions de dollars, a-t-elle précisé.

M. THOMAS MAYR-HARTING, Chef de la délégation de l’Union européenne, a indiqué que dans le contexte d’une nouvelle reconfiguration des forces de la MINUSTAH, il sera important que la Mission reste axée sur son mandat de base à savoir, le soutien au processus politique, le renforcement de l’état de droit et l’appui aux institutions chargées d’assurer la sécurité.  L’Union européenne, a-t-il promis, va maintenir son appui, notamment la formation d’une Police nationale solide et efficace.  Les progrès réalisés jusqu’ici, a-t-il voulu, ne devraient pas être compromis par la mise en place d’une deuxième force de sécurité par les autorités haïtiennes.  S’agissant des critiques envers la MINUSTAH, le représentant a souhaité que des enquêtes fassent la lumière sur les allégations.

M. Mayr-Harting a rappelé que ces deux dernières années, l’Union européenne a apporté une contribution de 358 millions d’euros à Haïti, sur les 522 millions d’euros prévus.  Il a regretté qu’un demi-million d’Haïtiens vivent toujours dans des camps dans lesquels le choléra persiste.  L’impasse politique actuelle doit cesser, a déclaré le représentant; Haïti et les Haïtiens ne pouvant se permettre d’autres troubles et situations instables.  Le Commissaire européen en charge du développement était en Haïti hier où il a annoncé une nouvelle contribution de 100 millions d’euros pour donner un nouvel élan au processus de reconstruction.

M. JUAN PABLO DE LAIGLESIA (Espagne) a reconnu qu’une occasion historique n’avait pas été saisie en Haïti.  « Le fait est que les résultats du transfert pacifique et démocratique de pouvoir ont été décevants surtout pour le peuple haïtien », a-t-il fait remarquer.  La responsabilité en incombe aux dirigeants politiques du pays, a-t-il estimé et leur incapacité à construire un dialogue institutionnel qui aurait dû donner la priorité à l’intérêt général.  « Cela ne peut pas continuer », a-t-il ajouté.  Le temps est venu d’en finir avec cette situation et la démission du Premier Ministre devrait être considérée comme un nouveau tournant.

Les priorités sont, selon lui, de nommer un nouveau premier ministre, de publier les amendements constitutionnels, d’organiser les élections législatives et le renouvellement d’un tiers du Sénat, d’adopter le budget pour 2012 de l’État et d’accélérer la réforme de la Police nationale d’Haïti.  À ce sujet, il faut, a-t-il dit, accélérer le recrutement des nouveaux policiers et porter de 10 000 à 16 000 leur effectif en cinq ans.  Il a par ailleurs expliqué que l’Espagne était le troisième contributeur bilatéral d’Haïti.  En juillet 2011, elle s’est engagée à créer un fonds de 50 millions d’euros en faveur des petites et moyennes entreprises, a-t-il dit, précisant que ce fonds était déjà disponible.

Intervenant au nom du « Groupe des Amis d’Haïti » composé de l’Argentine, du Brésil, du Canada, du Chili, de la Colombie, de la France, du Guatemala, du Pérou, des États-Unis et de l’Uruguay, M. JOSÉ LUIS CANCELA (Uruguay) s’est félicité des progrès accomplis en matière de reconstruction et de consolidation de la paix, dont le renforcement de l’état de droit et la désignation tant attendue du Président et du Vice-Président de la Cour de cassation.  Il s’est dit très inquiet des tensions constantes entre l’exécutif et le législatif ainsi que des tensions au sein de l’exécutif.  Il a exhorté les dirigeants haïtiens à surmonter leurs divergences, à se concentrer sur la consolidation des institutions nationales et de l’état de droit, et à répondre aux besoins et aspirations du peuple.  Il faut, a-t-il encouragé, atténuer l’impact politique sur la sécurité, en soulignant le rôle fondamental de la Police nationale haïtienne.

Il a tenu à souligner que le personnel militaire et de police de la MINUSTAH a joué un rôle vital dans le maintien de la sécurité et la réforme et la formation de la Police nationale.  Le représentant a affirmé que son pays a donné suite à un cas grave d’abus sexuels commis par un de ses ressortissants.  La justice pénale uruguayenne a été saisie et elle examine l’affaire en coopération avec les autorités haïtiennes et le Secrétariat de l’ONU dans le souci de rendre justice en toute légalité.  Le représentant a conclu en prévenant les autorités haïtiennes qu’il ne saurait y avoir de stabilité ni de développement véritable sans le renforcement des institutions démocratiques.

M. ABDOU SALAM DIALLO (Sénégal) a relevé que le nombre de résolutions adoptées par le Conseil de sécurité sur Haïti entre 2004 et 2011, plus d’une dizaine, témoigne de l’intérêt que le Conseil attache au relèvement d’Haïti.  Il a salué « les progrès significatifs » qui sont nés de la collaboration entre la MINUSTAH et les autorités haïtiennes, comme le laisse voir le rapport du Secrétaire général.  Il a tout de même déploré l’instabilité politique qui prévaut en Haïti, en prévenant que l’absence d’une feuille de route consensuelle entre les différentes forces politiques pourrait saper les résultats encourageants enregistrés jusqu’ici.  M. Diallo a rappelé que le Sénégal contribue à la stabilité d’Haïti par un contingent de troupes.  Il a également évoqué les programmes d’accueil et d’insertion de ressortissants haïtiens au Sénégal.

M. GUILLERMO E. RISHCHYNSKI (Canada) a tout d’abord évoqué la démission, le 24 février dernier, du Premier Ministre Garry Conille, pour affirmer ensuite qu’un trop grand nombre de représentants de l’élite politique demeuraient indifférents aux conditions extrêmement difficiles des Haïtiens.  À l’instar du rapport du Secrétaire général, il a vivement souhaité que les acteurs politiques haïtiens des pouvoirs législatifs et exécutifs s’élèvent au-dessus des disputes partisanes et les a appelés à assumer pleinement leurs responsabilités.

Le Canada, a-t-il également fait savoir, observe avec une vive préoccupation la mobilisation de groupes armés.  Il a dit espérer que les mesures prises par le Gouvernement permettront de démanteler ces groupes et de les empêcher de déstabiliser le pays.  Il a rappelé « avec force » que la priorité est le développement de la Police nationale haïtienne et la mise en œuvre de toutes ses composantes opérationnelles.  « Nous ne devons en aucun cas nous laisser distraire de cet objectif dans lequel le Canada a fait des investissements majeurs », a-t-il souligné.  Il a également affirmé que seule une lutte sincère et acharnée contre la corruption et pour l’établissement d’un état de droit donnera un vrai sens aux efforts en vue d’attirer les investissements étrangers et redresser l’image négative du pays.

M. Rishchynski a ensuite enjoint le Gouvernement haïtien à prendre des mesures fermes contre la corruption, y compris en accordant le soutien et l’indépendance nécessaires à la Commission de vérification, chargée d’enquêter sur les contrats octroyés au lendemain du séisme, et à la Commission indépendante d’experts, chargée d’enquêter sur les cas d’assassinat non résolus.  Le processus de reconstruction haïtien doit être pris en main par des acteurs politiques responsables, a-t-il martelé, et ce processus doit aussi être transparent et juste.  Le représentant a dit espérer que le Parlement et le pouvoir exécutif agiront rapidement afin de s’entendre sur la nomination du nouveau premier ministre, de façon à ne pas paralyser davantage le fonctionnement du Gouvernement.  Haïti se heurte à de nombreux problèmes auxquels il faut s’attaquer de toute urgence, au premier rang desquels figurent la réforme constitutionnelle et les efforts pour créer un conseil électoral permanent, a-t-il par ailleurs indiqué.

M. TSUNEO NISHIDA (Japon) a appelé la MINUSTAH à se concentrer sur ses missions vitales tout en mettant l’accent sur la nécessité pour le Gouvernement haïtien de s’approprier la reconstruction.  Il s’est particulièrement félicité du renforcement des capacités de la Police nationale haïtienne.  Le Gouvernement haïtien doit assurer un socle socioéconomique solide pour renforcer l’état de droit et les institutions nationales, a-t-il insisté.  Il a exhorté les partenaires internationaux à coordonner leurs efforts dans un souci d’efficacité.  Il s’est dit préoccupé par l’instabilité politique en Haïti qui a conduit à la démission du Premier Ministre Garry Conille, après seulement quatre mois d’exercice du pouvoir, et l’impasse dans laquelle se trouvent maintenant les branches exécutive et législative.  Il a espéré que le nouveau premier ministre pourra être confirmé rapidement et que le Gouvernement haïtien sera en mesure de s’emparer du processus de reconstruction et de relèvement.

Le représentant a estimé que la priorité était de transformer la PNH en une institution crédible, et a souhaité que les ressources limitées de la communauté internationale soient utilisées de la façon la plus efficace.  Il s’est inquiété de l’occupation de casernes par d’anciens militaires en demandant au Gouvernement de faire face à cette menace.  Il a demandé aux Nations Unies de mettre en œuvre une politique de tolérance zéro afin de lutter contre toutes formes d’abus sexuels.  Il s’est dit convaincu qu’Haïti et le Japon, qui se relève du tremblement de terre et du tsunami du 11 mars 2011, parviendront à atteindre leurs objectifs grâce à une aide coordonnée de la communauté internationale.

M. OCTAVIO ERRÁZURIZ (Chili) a affirmé que son pays poursuivrait son engagement en faveur du peuple haïtien.  Il a regretté les tensions qui ont cours entre les pouvoirs exécutif et législatif dans le pays, et a souhaité que des élections législatives et municipales soient organisées afin que la situation politique puisse se stabiliser.  Le représentant a salué les progrès dans le renforcement du système judiciaire, notamment la mise en place de la Cour de cassation, et l’annonce de l’établissement futur du Conseil de l’autorité judiciaire.

Sur les questions sécuritaires, il a dit soutenir le renforcement, par la MINUSTAH, de la Police nationale haïtienne par des formations.  Il s’est dit inquiet de la recrudescence des groupes armés qui défient les autorités.  Il a par ailleurs souligné le rôle que joue la MINUSTAH dans la mise en place de projets d’impact rapide.  Il a ainsi salué le travail d’une équipe conjointe équatorienne et chilienne qui œuvre sur le terrain dans des activités de génie civil.  Il a souhaité que les populations locales puissent progressivement prendre le relais de la communauté internationale dans le cadre de la reconstruction nationale.  En ce qui concerne les manquements éthiques au sein de troupes de la MINUSTAH, il a souhaité que des sanctions soient prises afin que ces actions ne puissent plus se répéter.

M. ENRIQUE ROMA-MOREY (Pérou) a mis l’accent sur deux éléments du rapport du Secrétaire général, l’appui aux autorités haïtiennes pour la création d’institutions publiques solides et l’importance de la stabilité face à la situation politique fragile.  Il a dit qu’il ne pouvait y avoir un développement économique et social durable en Haïti sans institutions solides en mesure de soutenir et promouvoir ce développement.  Il s’agit surtout de réaffirmer le principe d’appropriation nationale en souhaitant qu’Haïti pilote le processus de reconstruction conformément aux stratégies et priorités nationales arrêtées.

Le représentant s’est dit très préoccupé par la fragilité politique en appelant les autorités à trouver rapidement une solution à la crise politique qui risque de menacer le développement économique et d’éroder les gains accumulés ces deux dernières années.  Il a jugé essentiel que le prochain processus électoral se tienne conformément au calendrier fixé.  Il a espéré que la Police nationale d’Haïti pourra dans un avenir proche donner l’exemple d’un cadre institutionnel solide qui promeuve l’état de droit et protège sa population.  Il s’est inquiété de la présence de groupes armés illicites qui se nomment « forces armées haïtiennes ».  Il a jugé essentiel de rappeler les trois piliers essentiels du relèvement d’Haïti que sont la gouvernance, la sécurité et le développement.