Journée de l’Enfant : pour un pays sans prison pour enfants

8 juin 2012

Journée de l’Enfant : pour un pays sans prison pour enfants

Dans le cadre de la « semaine de l’enfant » qui se déroule du 4 au 10 juin en prélude à la Journée de l’Enfant, le 12 juin prochain, les mineurs actuellement détenus au Centre de Rééducation des Mineurs en Conflit avec la Loi de Delmas 33 (CERMICOL), ont eu droit à une attention particulière cette année.

Journée de l’Enfant : pour un pays sans prison pour enfants

Photo : Victoria Hazou – UN/MINUSTAH

En effet, en présence de la directrice de l’IBESR, Mme Arielle Villedrouin, la première dame de la République Mme Sophia Martelly, du ministre de la Justice, Jean Renel Sanon, du directeur l’Administration pénitentiaire, Frantz Charles Deronneth, de représentants de l’Unicef dont Denise Ulwor, officière affectée à la Protection de l’Enfant, et Sebukoko Jean Bosco de l’Unité Corrections de la MINUSTAH, 18 adolescents sur les 130 incarcérés ont été libérés par « grâce présidentielle ».

C’est Mme Martelly en personne qui a annoncé la remise en liberté de ces mineurs,  estimant qu’en 2012 il est grand temps que « la prison pour enfants soit abolie et qu’en même temps des centres d’apprentissage les remplacent ». Tout en invitant les enfants à donner des signes d’encouragement par leur comportement, Mme Martelly a promis de travailler à l’amélioration de leurs conditions d’existence.

Parmi les personnes libérées, figure ce jeune, originaire de la commune de Marmelade (Haut-Artibonite), arrêté en 2009 dans le cadre d’une enquête relative à l’attaque d’une dame aux Gonaïves. Jeando, (nous l’appellerons ainsi) durant sa détention, a appris le métier de tailleur et n’aura besoin que d’une machine à coudre pour pouvoir recommencer une vie normale. Dénonçant certaines conditions dans lesquelles il a vécu sa détention, il a souhaité ne jamais avoir à revenir dans ce lieu.

En effet, « on mange dans sa cellule, souvent on y fait également ses besoins physiologiques », s’est plaint un autre compagnon, Edris, appréhendé à Petit-Goâve, (Ouest) pour l’incendie  d’une maison. « On n’a qu’une heure de récréation par jour, parfois on ne nous laisse même pas sortir. On n’a pas de loisirs », se désole-t-il.

Si dans certains cas les droits de ces enfants ont été violés, pour avoir été par exemple jugés par des tribunaux de droit commun, ils ont surtout été libérés à cause de leur bon comportement, a souligné le chef du Parquet de Port-au-Prince, Me Jean Renel Cénatus, qui émet lui aussi le vœu « que la prison pour enfants soit fermée et que soit ouvert à la place, un réel centre de rééducation, de manière à ce que ces adolescents, lorsqu’ils en sortiront, puissent être utiles à la société ».

Selon Me Betty Demorcy, directrice du CERMICOL, le fait même d’être en prison empêche les jeunes d’apprendre, d’être réceptifs. En ce sens, elle souhaite « que la justice soit plus active et que les enfants puissent être fixés sur leur sort ». Car, ce qu’il faut surtout c’est d’avoir les moyens de « combattre l’oisiveté chez ces adolescents », de manière à ce qu’ils puissent se mettre au travail, poursuivre leurs études et apprendre un métier.

Pour pallier ce déficit, certains organismes internationaux dont l’ONU, à travers l’UNICEF et la MINUSTAH, apportent un appui considérable à la justice haïtienne. La MINUSTAH par exemple, à travers son Unité Corrections travaille en permanence aux côtés de la Direction de l’Administration Pénitentiaire, (DAP) pour combattre la détention préventive, aider à la gestion des greffes et améliorer l’état des prisons, en réhabilitant les infrastructures ou en les dotant d’espaces de loisirs, a indiqué Sebukoko, officier mentor à l’Unité Corrections.

Se félicitant d‘avoir aidé à la préparation des dossiers des jeunes libérés, il a fait remarquer que sur les 130 jeunes en contravention avec la loi, détenus à Delmas 33, 15 ont été jugés, et que les 89% restants, sont en détention préventive prolongée.

« Nou vle chanje, nou ka chanje, pou Ayiti ka dekole », ce qui se traduit en français par « Nous voulons changer, nous pouvons changer, pour qu’Haïti puisse se lancer vers le progrès », ont lancé ces jeunes à l’intention de l’assistance, pour signifier leur volonté de changer de vie.

Tenue au local du CERMICOL, à Delmas 33, à l’initiative de l’IBESR, la cérémonie s’inscrivait dans le cadre de la semaine de l’enfant organisée dans le pays à l’occasion de la journée nationale de l’enfant commémorée chaque année, le 2e dimanche de juin.

Pierre J. Richard