Lambert Wilson, un « acteur écologiste » à la rencontre des paysans du Sud d’Haïti

27 avr 2013

Lambert Wilson, un « acteur écologiste » à la rencontre des paysans du Sud d’Haïti

En visite dans le Sud d’Haïti les 25 et 26 avril derniers, le comédien Français Lambert Wilson a échangé sur le métier d’acteur avec des jeunes des Cayes et découvert des projets de reforestation par les femmes d’Aquin.

Lambert Wilson, un « acteur écologiste » à la rencontre des paysans du Sud d’Haïti

Photo : Igor Rugwiza – UN/MINUSTAH

Le premier voyage de l’acteur français en Haïti, vers le Sud, l’a plongé au cœur de la réalité des jeunes chanteurs et acteurs de théâtre, issus de quatre quartiers populaires des Cayes. « Je suis agréablement surpris de constater qu’il y a parmi ces jeunes des acteurs formidables », a reconnu, enthousiaste, le Mérovingien du film « Matrix », face a cette cinquantaine de jeunes qui n’ont reçu aucune formation théâtrale.

Devant l’acteur devenu pour un temps « spectateur », les jeunes bénéficiaires du projet ‘Podium pour la paix’ ont joué et chanté des pièces de théâtre aux messages contre la violence et le phénomène des ‘Restaveks’, ou domesticité infantile. Mis en œuvre par l’Association pour la promotion de la paix par les arts (APPARTS), ces ‘Podiums’ sont financés par le programme conjoint pour la prévention des conflits et la cohésion sociale (MDG-F).

« J’ai compris que leurs textes étaient basés sur des expériences personnelles, vécues. Avec ce projet, ils souhaitent créer une prise de conscience que ces maux ne sont pas inévitables, comme beaucoup le pensent ici. C’était une expérience forte », dit l’acteur qui s’est prêté au jeu des questions-réponses avec les jeunes acteurs. « L’échange a été si intense et long que j’ai, du coup, été amené à réviser moi-même certaines notions du théâtre », rit l’interprète de l’Abbé Pierre, fondateur du mouvement Emmaüs, dans le célèbre « Hiver 54 ».

L’effervescence des jeunes se mélangeait à la curiosité de Lambert Wilson. D’ou vient aux jeunes ce savoir-faire d’acteurs avec tant « d’énergie et d’humour » ?, s’interroge t-il, étonné. « J’ai pu facilement imaginer et écrire ma scène car, dans mon quartier de La Savane, je suis le témoin quotidien de ces histoires d’enfants sans cesse battus qui font toutes les corvées domestiques, et rêvent d’aller à l’école comme les autres », explique Bertrande Dimanche, qui incarnait le rôle d’une tante acariâtre se repentant d’avoir maltraité sa nièce ‘Restavek’.

« Une île qui fond dans la mer »

 Dans le jardin botanique des Cayes, Lambert Wilson a été stupéfait de découvrir un havre de paix où poussent, sur 8 hectares de terre, toutes les essences d’Haïti. Le comédien français dit croire que ce bel effort doit inspirer la jeunesse à s’engager dans la protection de l’environnement.

Visiblement touché par les histoires des jeunes et concerné par la dégradation de l’environnement haïtien, il a regretté de découvrir de l’hélicoptère « une terre râpée, une île qui fond dans la mer comme une hémorragie de terre ». Parcourant les allées de la pépinière de Marre-à-Coiffe, dans la 5ième section communale d’Aquin, il a reconnu que de telles initiatives sont essentielles à la survie des générations futures.
Lambert Wilson, un « acteur écologiste » à la rencontre des paysans du Sud d’Haïti
Financé par le PNUD, le projet de pépinière permet aux petits propriétaires terriens de reboiser leurs terres tout en les valorisant. En effet, à terme, ils planteront des caféiers a l’ombre des jeunes arbres pour s’assurer un revenu régulier.

« Ce projet est formidable dans la mesure où il a un double aspect écologique et social car il permet d’aider la population des milieux ruraux », a compris Lambert Wilson, qui se souvient de ses années de militant écologiste aux côtés de l’organisation Greenpeace. Et de rappeler que la briquette écologique peut être une alternative au charbon de bois, principale cause de la déforestation en Haïti.

Malgré la pluie qui le surprend au milieu des champs d’arbres forestiers plantés par l’Organisation Tête Ensemble de Pitota (OTEP), Lambert Wilson ne cache pas sa stupéfaction de découvrir des collines semblables à celles qui ornent la Bourgogne, où se trouve sa maison de campagne. Il se rappelle même que certains flancs étaient aussi dépourvus d’arbres jusqu’à ce que les habitants de la zone se décident à les reboiser.

A Tête-Létang, l’acteur a rencontré 3 organisations travaillant bénévolement dans le cadre du projet de régénération de la forêt sèche d’Aquin, administré par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Les femmes de ce village ont produit 200 000 plantules sur 138 plates-bandes comprenant des arbres forestiers, fruitiers et ornementaux. « Il faut penser aussi à produire des plantules destinées à la vente pour augmenter votre revenu », conseille Lambert Wilson aux femmes tout en les aidant à repiquer des pousses de cèdre.

« Nous n’avons pas besoin d’être payé pour travailler au développement de notre de zone car notre souhait est de laisser en héritage à nos enfants un environnement où il fait bon vivre », sourit Marie Elda Jean-Charles, coordonnatrice de l’Association de développement des femmes de Tête Létang (ADFT).

Un engagement dans lequel l’acteur se reconnaît. « Ici, ce qui me passionne, c’est l’énergie… les gens travaillent dur ici. Je dois dire que c’est l’un des voyages les plus passionnants de ma vie », confesse Lambert Wilson, à la fin de son séjour dans le Sud.

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Myrline Lucien et Sophie Boudre