Point de presse des Nations Unies, Jeudi 22 novembre 2012

23 nov 2012

Point de presse des Nations Unies, Jeudi 22 novembre 2012

INTERVENTION  DU  PORTE  PAROLE  ADJOINT  DE  LA MINUSTAH, VINCENZO PUGLIESE

Bonjour à tous et bienvenue à ce point de presse des Nations Unies.

Nous avons aujourd’hui un invité de marque, le Directeur général du ministère de la Planification, M. Yves Robert Jean, qui fera le point sur les grandes lignes du rapport de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), consacré aux Pays les Moins Avancés (PMAs). Le thème du rapport de cette année : « Mettre à profit les envois de fonds et les compétences des diasporas pour mieux renforcer les capacités productives ».

M. le Directeur, vous avez la parole.

 

INTERVENTION DU DIRECTEUR GENERAL DU MINISTERE DE LA PLANIFICATION, M. YVES  ROBERT  JEAN

Bonjour tout le monde, Chers amis de la presse.

C’est un plaisir pour moi ce matin, en tant que Directeur général du ministère de la Planification et de la Coopération Externe de procéder au lancement officiel du Rapport de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNECED). D’abord, je crois utile de rappeler ce que cela veut dire : être un pays moins avancé, comment devient –on un PMA ?  Il y a aujourd’hui, au moment où je vous parle, environ 48 pays qui figurent sur la liste des pays les moins avancés. C’est une liste qui est pratiquement revue chaque trois ans par le Conseil de développement économique et social des Nations Unies sur la base d’un certains nombre de critères.

D’abord, celui relatif aux faibles revenus : Un pays qui a un revenu inférieur à 905 dollars par habitant, automatiquement, peut-être inscrit sur la liste. Et à partir du moment où ce pays  a un revenu qui dépasse 1086 dollars, ce pays peut-être extrait de la liste.  Le critère de faible revenu est très important parce que c’est l’un des trois critères fondamentaux. Si on a satisfait au critère du faible revenu, parfois, il n’est même pas essentiel de considérer les deux autres critères. Le deuxième critère est celui de la vulnérabilité économique. La vulnérabilité économique dans lequel intervient ce qu’on appelle l’indice de vulnérabilité économique. Cet indice est basé sur les indicateurs de certains domaines tels que, par exemple, le niveau d’alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation dans l’enseignement secondaire. Dans le domaine de la santé, par exemple, le taux de mortalité infantile et le domaine de la nutrition. Finalement, le troisième critère utilisé est celui de l’indice de la faiblesse du capital humain. Sur la base de ces trois critères, une liste de pays est régulièrement revue chaque trois ans.

Le Botswana et le Cap-Vert sont deux pays qui ont pu sortir de la liste. Il y a peut-être d’autres pays qui sont sur la liste, et on attend de réévaluer les critères pour savoir si on les garde sur la liste ou si on les retire.

Maintenant, le rapport de cette année porte sur la mise à profit, non seulement des envois de fonds, c’est-à-dire, les transferts de fonds que font les ressortissants des 48 PMAs, mais il porte aussi sur l’utilisation des compétences de ces ressortissants dans le renforcement des capacités productives d’un pays. La capacité productive, c’est non seulement la capacité d’innover et la capacité en termes de recherche. Mais également, les capacités productives, en termes d’infrastructures.

Idéalement, il s’agit de voir comment est-ce que les transferts que font les 27 millions de ressortissants en provenance de 48 PMA. Ces transferts qui sont évalués à environ 28 milliards de dollars, comment peut-on les canaliser vers le financement de l’investissement, vers le développement des petites et moyennes entreprises et vers le développement rural. Ici, en Haïti, on le sait très bien,  que ces transferts pratiquement favorisent la consommation. Ils sont d’un montant particulièrement important. Ils sont plus élevés que le niveau des exportations haïtiennes. Haïti est avec le Soudan et le Népal les pays dont les envois de fonds sont d’une importance capitale parmi les 48 pays du système.  Des 48 PMA, Haïti a reçu à lui seul 6% du total des envois et c’est beaucoup. L’idée est de voir comment ces 48 pays qui figurent sur la liste des PMA, comment ils peuvent arriver à transformer structurellement leur économie, comment est-ce qu’on peut lutter contre la pauvreté, comment est-ce qu’on peut modifier la diversification des structures de nos revenus, en injectant ces 27 milliards, en les canalisant vers l’investissement et d’autres services ?

Le rapport de cette année, je l’ai dit tout à l’heure, décrit clairement les incidences des envois de fonds surtout sur le revenu des ménages. Les transferts sont importants, c’est vrai, mais l’initiative aussi de pouvoir réfléchir sur le nouveau rôle qui peut être alloué à ces transferts est tout aussi légitime. Le risque de voir aujourd’hui l’économie mondiale entrer dans une longue période de stagnation et de déflation, ce risque aujourd’hui est particulièrement élevé. On voit déjà venir certains signaux de récession au niveau de l’économie mondiale. Il est donc, non seulement prudent, mais il est extrêmement urgent aujourd’hui pour les pays les moins avancés de repenser les politiques relatives aux transferts de fonds et le rôle que ceux-ci peuvent jouer, non seulement dan la promotion du développement industriel des 48 économies des PMAs, mais également dans la transformation structurelle de leurs économies. Finalement, à part le fait que les initiatives soient légitimes, elle est aussi réaliste. En moins de dix ans, le nombre des émigrants originaires des PMAs a sensiblement augmenté et est passé en moins de 10 ans, de 19 millions à 27 millions de ressortissants. Et quand on prend également la même période, vous allez voir que les envois de fonds et transferts sont pratiquement multipliés par 8 et sont passés de 3 milliards à 27 milliards de dollars. On parle donc de montants importants en provenance de pays sous-développés qui en ont besoin et on parle aussi d’un nombre de ressortissants particulièrement importants, soit 27 à 30 millions de ressortissants. Voilà en gros ce que je souhaitais dire pour initier la discussion.

 

Questions-Réponses

RFM : Je voudrais avoir une idée de la situation d’Haïti aujourd’hui par rapport aux 47 autres pays de la liste ?

La situation d’Haïti est particulièrement intéressante de ce point de vue parce que, quand on parle de la diaspora, on parle de renforcement des capacités d’Haïti. L’un des problèmes prioritaires aujourd’hui, c’est le renforcement des capacités productives en Haïti. On n’a pas suffisamment de profil en termes d’ingénieurs, de gestionnaires…etc. ici en Haïti. La diaspora pourrait certainement être mise à contribution dans ce domaine. Il est bon de savoir que 4 sur 5 des gens formés en Haïti ont émigré. L’exode des cerveaux a particulièrement affecté les PMAs d’une manière très générale, mais particulièrement la République d’Haïti. A part cela, quand on regarde le niveau des exportations d’Haïti, ce sont des exportations qui permettent certainement de générer des devises et de rééquilibrer la balance commerciale. Eh bien, le niveau des transferts est nettement plus élevé que celui des exportations haïtiennes. Donc, en termes de pourcentage du PIB finalement, vous allez voir que parmi les 48 PMAs, Haïti fait partie des trois ou quatre pays dont le pourcentage des transferts par rapport au PIB est le plus élevé.

Kiskeya : Avez-vous des chiffres plus précis sur Haïti, par exemple, à propos de l’évolution du nombre de ressortissants pour les PMAs, qui est passé de 19 à 27 millions ?

Pour Haïti, il y a autant de chiffres que de sources. Il y a un travail monstre qui a été fait aujourd’hui par le ministère des Haïtiens vivant à l’étranger. Ils ont pratiquement sorti les derniers chiffres et qu’on est en train de reconsidérer et de valider. C’est certain qu’on est passé de 19 millions à 27 millions, de 2000 à 2011, pour les 48 PMAs, mais pour Haïti, selon certaines sources, on prétend qu’on aurait à peu près 4 millions d’Haïtiens à l’extérieur. Mais j’attends encore les derniers chiffres du ministère dont le mandat légal est justement de produire certaines informations relatives à la diaspora avant de me prononcer de manière très officielle sur le nombre de nos compatriotes vivant à l’extérieur. Il y a un travail en cours maintenant, une sorte de recensement pour dire clairement lesquels de nos compatriotes et combien sont-ils qui vivent à New York, à Montréal,…etc.

Et le montant des transferts ?

Le montant des transferts est particulièrement élevé. Cela doit être dans les milliards de dollars. Ce montant représente aujourd’hui à peu près 20% du PIB. Le montant des transferts est nettement supérieur à celui des exportations haïtiennes. Mais il peut être seulement inférieur à celui de l’aide publique au développement. Dans ce cadre, le cas d’Haïti n’est pas différent de celui des autres PMAs. Vous allez voir que la seule source de revenus capable de concurrencer, si vous voulez, les flux de revenus qui sont injectés dans les PMAs, c’est uniquement l’aide publique au développement.

Radio Vision 2000 : J’aimerais savoir quel est la position occupée par Haïti dans le classement de cette année et aussi vous aviez parlé des citoyens éduqués qui ont émigrés, selon vous qu’est-ce qui explique cette situation là ?

Haïti a un statut de PMA et pour  être classé parmi les PMAs, on se base d’abord sur le critère de bas revenu. Haïti a un revenu nettement inferieur à US 905 dollars par habitant. Sur cette base, elle fait partie des PMAs. Un autre facteur est que le pays est très vulnérable économiquement on l’a vu récemment avec le passage du cyclone Isaac et de la tempête tropicale Sandy. Les chocs commerciaux frappent Haïti de manière catastrophique et les chocs naturels ont des répercussions négatives sur le pays et finalement, au niveau de la faiblesse du capital humain, que ce soit au niveau de la scolarisation, de la nutrition et de l’alphabétisation des adultes, Haïti satisfait les trois critères. Le pays n’est pas ipso facto inscrit sur cette liste. Au contraire, il faut une demande formelle du gouvernement pour être inscrit sur la liste. Cette demande avait été faite il y a plus de 10 ans. Donc Haïti jouit encore de ce statut de pays moins avancé – en fait, il y a aussi des avantages liés à ce statut. Maintenant qu’est-ce qui explique cette situation ? Quand vous avez un pays de 27 mille kilomètres carrés et vous voyez qu’après le tremblement de terre on a constaté que 80% des activités économiques sont concentrés à Port-au-Prince, et l’essentiel des recettes fiscales se fait dans la capitale. Celle-ci peut  mourir d’asphyxie. On a une situation où les pôles régionaux n’on pas été suffisamment développés, et la misère force les gens à laisser le milieu rural pour venir à  Port-au-Prince. Ils viennent grossir la population les bidonvilles de la capitale en quête d’emploi. À la moindre occasion, ils prennent le bateau ou l’avion pour quitter le pays. C’est une situation économique constatée essentiellement au cours des dernières 25 années.

Pour répondre à l’autre volet de la question, il n’existe pas un classement des PMAs. C’est tout simplement une liste avec des pays qui sont prêts à sortir et d’autres qui entrent. Mais il y a aussi une période de grâce de trois ans avant de consacrer définitivement qu’un pays soit rayé de la liste.

Qu’est ce qui devrait être fait pour retirer Haïti de cette liste ?

J’aime bien cette question parce que ce qui devrait être fait est en train de se faire maintenant. Il faut premièrement une vision et sortir du ponctuel comme cela a toujours été le cas et avoir une vision de ce qui peut être fait.  Aujourd’hui on a une vision. Un plan stratégique de développement d’Haïti a été mis sur la table. C’est-à-dire, les différents partenaires techniques et financiers d’Haïti savent où se trouve Haïti actuellement et la place qu’elle devra occupée dans les prochaines années. On a parlé aussi de pays émergents. Des pays qui ne sont pas riches mais qui ont une rupture avec une façon de penser et de faire. Des pays comme le Brésil et le Qatar sont des pays potentiellement riches sont sur la liste des pays émergents en même temps que des pays de l’Afrique dont les revenus sont moins élevés sont également sur la liste des pays émergents. Il y a une vision qui est sur la table. Une vision qui est réaliste. Elle part de l’idée que ce pays d’une superficie de 27 mille Kilomètres carrés il faut arriver à investir au niveau des douze pôles régionaux. À partir du Nord Ouest en passant par Ouanaminte, Fort-Liberté, le Cap-Haitien, Gonaives, Saint-Marc, Hinche jusqu'à la péninsule du Sud en passant par Jacmel et les Cayes, il faut arriver à mettre en place les grands équipements sociaux et économiques capables de stabiliser la population, de créer des emplois et de stimuler la richesse. Des plans d’urbanisme et des plans stratégiques ont été élaborés sur trois axes et il appartient maintenant au gouvernement de s’asseoir avec ses partenaires techniques et financiers et de vendre ce plan pour qu’on puisse le financer de manière adéquate.

Pensez-vous qu’on est sur la bonne voie pour que le pays soit considéré « émergent » effectivement en 2030 comme le font croire les autorités locales?

Oui ! On est sur la bonne voie. Mais être sur la bonne voie ne veut pas dire que l’on va arriver à destination. Comme je vous l’ai dit, le pays n’a pas suffisamment de ressources, l’épargne nationale est faible. On n’a pas suffisamment d’épargne pour pouvoir financer ces gros investissements. Il faut donc compter sur l’épargne internationale. Or de ce coté ci aussi vous allez voir que ce n’est pas facile. Vous avez assisté aux différentes promesses faites par le passé et qui n’ont pas été concrétisées en raison du contexte mondial qui est très difficile comme par exemple la récession, période de stagnation et d’inflation qu’on voit venir aussi. Tout ceci risque d’affecter le montant des contributions qu’on espère de la communauté internationale. Mais si tout se passe bien, je dirais qu’on est sur la bonne voie. Mais le développement est une œuvre de longue haleine, ce n’est pas du jour au lendemain qu’on arrivera à développer un pays. Mais on peut déjà mettre les bases pour la transformation structurelle.

Kiskeya : Dans votre présentation du rapport vous avez souligné la nécessité de repenser les politiques relatives au transfert de fonds des ressortissants des 48 PMAs, Pouvez-vous nous donner une idée de la politique appliquée en Haïti sur la question ?

Il faut d’abord voir comment cela se passait avant. Le transfert reçu va financer la consommation de ce qui est importé et cela affecte négativement la balance commerciale. Ces transferts sont utiles et importants  mais leurs affectations peuvent risquer à moyen et à long terme de nuire à l’avenir les changements dans la transformation structurelle de l’économie. Au niveau du ministère des haïtiens vivants à l’étranger, un tas de mesures ponctuelles et structurelles sont en train d’être prises pour canaliser les transferts de fonds en provenance de la diaspora. Des mécanismes seront mis en place pour crédibiliser l’exercice de manière à ce que certains membres de la diaspora puissent non seulement envoyer de l’argent à des proches en Haïti, mais aussi puissent investir dans des pôles de fonds et des structures aptes à accueillir ces fonds et à les investir de façon productive. Deuxièmement, Il faudrait associer de façon plus intime les banques commerciales aux institutions de micro financement. Dans certains pays, la poste qui a un impact beaucoup plus important en régions que les banques commerciales est abondamment utilisée pour ce genre d’exercice. Il faut repenser le rôle de ces services financiers ou bien ajuster ce rôle par rapport au besoin de recanalisation des transferts de fonds qui viennent de la diaspora. Un tas d’initiatives sont en cours et j’espère qu’elles vont porter des fruits. C’est un exercice classique, c’est la tradition que chaque année la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement qui réfléchit sur le sort des pays les moins avancés publie une étude. Les études antérieures ont porté sur la croissance économique, la réduction de la pauvreté, le renforcement des capacités productives, le savoir, la technologie et cette année sur les envois de fonds des diasporas.

Pouvez-vous m’éclairer sur la façon dont l’Etat haïtien compte faire pour recanaliser les fonds de transferts dans des projets de développement puisque ces fonds sont envoyés à des particuliers pour des besoins spécifiques comme l’écolage, le loyer etc. ?

J’ai déjà répondu à cette question en partie. Ce n’est  pas un exercice trop facile si l’on se réfère à l’expérience de l’Irlande et d’Israël. Les fonds envoyés par la diaspora sont destinés à des familles et proches. Les émigrés changent de statut. Les fils des enfants qui sont partis des années de cela détiennent aujourd’hui une maitrise. Donc, imaginer que certains émigrés sont des cerveaux et des compétences bien rémunérés qui peuvent contribuer au développement du pays. Maintenant, s’ils sont certains que le gouvernement haïtien met en place, à travers le ministère mandaté pour le faire, un mécanisme crédible destiné à capter ces épargnes qui viennent de l’extérieur, automatiquement on va commencer à voir la différence au niveau du volume de fonds. Ensuite le ministère réfléchit sur des initiatives pour voir comment un minimum d’argent puisse aller à d’autres choses que la consommation. Comment cette diaspora puisse réunir et prendre la décision d’investir dans un secteur qui soit capable de générer des revenus, pas nécessairement par le biais du gouvernement. Ce genre d’initiative on peut le faire.

Caraïbes : Si je comprends bien, il est prévu un prélèvement sur les transferts ?

Pas un  prélèvement. Un transfert est un acte délibéré de quelqu’un qui envoie de l’argent à un particulier. Mais les mécanismes vont crédibiliser la démarche de manière à créer un climat de confiance. Car celui qui envoie 100 dollars pourrait tout aussi bien envoyer 400 s’il a confiance dans le mécanisme établi. Voilà.

 

 

Contacts media:

Yasmina Bouziane, Chef de la Communication et de l’Information publique, MINUSTAH

Cell: (509) 3702 8001; tel : 2240 2050, ext.6182

Email : bouziane@un.org

 

Vincenzo Pugliese, porte-parole adjoint, MINUSTAH

Cell : (509) 3702 6710 ; tel : 2240 2050, ext.3992

E-mail : pugliesev@un.org

 

Michel Alston, porte-parole UNPOL

Cell : (509) 3702 6655 ; tél: 2240 2050, ext.3096

E-mail : alston@un.org

 

Lieutenant Colonel Marcos Santos, porte-parole militaire

Cell : (509) 3728 7606

E-mail : santos4@un.org

 

ou consultez le Site Internet de la Mission  au  http://www.minustah.org 

 

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INTERVENTION  DU  PORTE  PAROLE  ADJOINT  DE  LA MINUSTAH, VINCENZO PUGLIESE

Bonjour à tous et bienvenue à ce point de presse des Nations Unies.

Nous avons aujourd’hui un invité de marque, le Directeur général du ministère de la Planification, M. Yves Robert Jean, qui fera le point sur les grandes lignes du rapport de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), consacré aux Pays les Moins Avancés (PMAs). Le thème du rapport de cette année : « Mettre à profit les envois de fonds et les compétences des diasporas pour mieux renforcer les capacités productives ».

M. le Directeur, vous avez la parole.

INTERVENTION DU DIRECTEUR GENERAL DU MINISTERE DE LA PLANIFICATION, M. YVES  ROBERT  JEAN

Bonjour tout le monde, Chers amis de la presse.

C’est un plaisir pour moi ce matin, en tant que Directeur général du ministère de la Planification et de la Coopération Externe de procéder au lancement officiel du Rapport de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNECED). D’abord, je crois utile de rappeler ce que cela veut dire : être un pays moins avancé, comment devient –on un PMA ?  Il y a aujourd’hui, au moment où je vous parle, environ 48 pays qui figurent sur la liste des pays les moins avancés. C’est une liste qui est pratiquement revue chaque trois ans par le Conseil de développement économique et social des Nations Unies sur la base d’un certains nombre de critères.

D’abord, celui relatif aux faibles revenus : Un pays qui a un revenu inférieur à 905 dollars par habitant, automatiquement, peut-être inscrit sur la liste. Et à partir du moment où ce pays  a un revenu qui dépasse 1086 dollars, ce pays peut-être extrait de la liste.  Le critère de faible revenu est très important parce que c’est l’un des trois critères fondamentaux. Si on a satisfait au critère du faible revenu, parfois, il n’est même pas essentiel de considérer les deux autres critères. Le deuxième critère est celui de la vulnérabilité économique. La vulnérabilité économique dans lequel intervient ce qu’on appelle l’indice de vulnérabilité économique. Cet indice est basé sur les indicateurs de certains domaines tels que, par exemple, le niveau d’alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation dans l’enseignement secondaire. Dans le domaine de la santé, par exemple, le taux de mortalité infantile et le domaine de la nutrition. Finalement, le troisième critère utilisé est celui de l’indice de la faiblesse du capital humain. Sur la base de ces trois critères, une liste de pays est régulièrement revue chaque trois ans.

Le Botswana et le Cap-Vert sont deux pays qui ont pu sortir de la liste. Il y a peut-être d’autres pays qui sont sur la liste, et on attend de réévaluer les critères pour savoir si on les garde sur la liste ou si on les retire.

Maintenant, le rapport de cette année porte sur la mise à profit, non seulement des envois de fonds, c’est-à-dire, les transferts de fonds que font les ressortissants des 48 PMAs, mais il porte aussi sur l’utilisation des compétences de ces ressortissants dans le renforcement des capacités productives d’un pays. La capacité productive, c’est non seulement la capacité d’innover et la capacité en termes de recherche. Mais également, les capacités productives, en termes d’infrastructures.

Idéalement, il s’agit de voir comment est-ce que les transferts que font les 27 millions de ressortissants en provenance de 48 PMA. Ces transferts qui sont évalués à environ 28 milliards de dollars, comment peut-on les canaliser vers le financement de l’investissement, vers le développement des petites et moyennes entreprises et vers le développement rural. Ici, en Haïti, on le sait très bien,  que ces transferts pratiquement favorisent la consommation. Ils sont d’un montant particulièrement important. Ils sont plus élevés que le niveau des exportations haïtiennes. Haïti est avec le Soudan et le Népal les pays dont les envois de fonds sont d’une importance capitale parmi les 48 pays du système.  Des 48 PMA, Haïti a reçu à lui seul 6% du total des envois et c’est beaucoup. L’idée est de voir comment ces 48 pays qui figurent sur la liste des PMA, comment ils peuvent arriver à transformer structurellement leur économie, comment est-ce qu’on peut lutter contre la pauvreté, comment est-ce qu’on peut modifier la diversification des structures de nos revenus, en injectant ces 27 milliards, en les canalisant vers l’investissement et d’autres services ?

Le rapport de cette année, je l’ai dit tout à l’heure, décrit clairement les incidences des envois de fonds surtout sur le revenu des ménages. Les transferts sont importants, c’est vrai, mais l’initiative aussi de pouvoir réfléchir sur le nouveau rôle qui peut être alloué à ces transferts est tout aussi légitime. Le risque de voir aujourd’hui l’économie mondiale entrer dans une longue période de stagnation et de déflation, ce risque aujourd’hui est particulièrement élevé. On voit déjà venir certains signaux de récession au niveau de l’économie mondiale. Il est donc, non seulement prudent, mais il est extrêmement urgent aujourd’hui pour les pays les moins avancés de repenser les politiques relatives aux transferts de fonds et le rôle que ceux-ci peuvent jouer, non seulement dan la promotion du développement industriel des 48 économies des PMAs, mais également dans la transformation structurelle de leurs économies. Finalement, à part le fait que les initiatives soient légitimes, elle est aussi réaliste. En moins de dix ans, le nombre des émigrants originaires des PMAs a sensiblement augmenté et est passé en moins de 10 ans, de 19 millions à 27 millions de ressortissants. Et quand on prend également la même période, vous allez voir que les envois de fonds et transferts sont pratiquement multipliés par 8 et sont passés de 3 milliards à 27 milliards de dollars. On parle donc de montants importants en provenance de pays sous-développés qui en ont besoin et on parle aussi d’un nombre de ressortissants particulièrement importants, soit 27 à 30 millions de ressortissants. Voilà en gros ce que je souhaitais dire pour initier la discussion.

Questions-Réponses

RFM : Je voudrais avoir une idée de la situation d’Haïti aujourd’hui par rapport aux 47 autres pays de la liste ?

La situation d’Haïti est particulièrement intéressante de ce point de vue parce que, quand on parle de la diaspora, on parle de renforcement des capacités d’Haïti. L’un des problèmes prioritaires aujourd’hui, c’est le renforcement des capacités productives en Haïti. On n’a pas suffisamment de profil en termes d’ingénieurs, de gestionnaires…etc. ici en Haïti. La diaspora pourrait certainement être mise à contribution dans ce domaine. Il est bon de savoir que 4 sur 5 des gens formés en Haïti ont émigré. L’exode des cerveaux a particulièrement affecté les PMAs d’une manière très générale, mais particulièrement la République d’Haïti. A part cela, quand on regarde le niveau des exportations d’Haïti, ce sont des exportations qui permettent certainement de générer des devises et de rééquilibrer la balance commerciale. Eh bien, le niveau des transferts est nettement plus élevé que celui des exportations haïtiennes. Donc, en termes de pourcentage du PIB finalement, vous allez voir que parmi les 48 PMAs, Haïti fait partie des trois ou quatre pays dont le pourcentage des transferts par rapport au PIB est le plus élevé.

Kiskeya : Avez-vous des chiffres plus précis sur Haïti, par exemple, à propos de l’évolution du nombre de ressortissants pour les PMAs, qui est passé de 19 à 27 millions ?

Pour Haïti, il y a autant de chiffres que de sources. Il y a un travail monstre qui a été fait aujourd’hui par le ministère des Haïtiens vivant à l’étranger. Ils ont pratiquement sorti les derniers chiffres et qu’on est en train de reconsidérer et de valider. C’est certain qu’on est passé de 19 millions à 27 millions, de 2000 à 2011, pour les 48 PMAs, mais pour Haïti, selon certaines sources, on prétend qu’on aurait à peu près 4 millions d’Haïtiens à l’extérieur. Mais j’attends encore les derniers chiffres du ministère dont le mandat légal est justement de produire certaines informations relatives à la diaspora avant de me prononcer de manière très officielle sur le nombre de nos compatriotes vivant à l’extérieur. Il y a un travail en cours maintenant, une sorte de recensement pour dire clairement lesquels de nos compatriotes et combien sont-ils qui vivent à New York, à Montréal,…etc.

Et le montant des transferts ?

Le montant des transferts est particulièrement élevé. Cela doit être dans les milliards de dollars. Ce montant représente aujourd’hui à peu près 20% du PIB. Le montant des transferts est nettement supérieur à celui des exportations haïtiennes. Mais il peut être seulement inférieur à celui de l’aide publique au développement. Dans ce cadre, le cas d’Haïti n’est pas différent de celui des autres PMAs. Vous allez voir que la seule source de revenus capable de concurrencer, si vous voulez, les flux de revenus qui sont injectés dans les PMAs, c’est uniquement l’aide publique au développement.

Radio Vision 2000 : J’aimerais savoir quel est la position occupée par Haïti dans le classement de cette année et aussi vous aviez parlé des citoyens éduqués qui ont émigrés, selon vous qu’est-ce qui explique cette situation là ?

Haïti a un statut de PMA et pour  être classé parmi les PMAs, on se base d’abord sur le critère de bas revenu. Haïti a un revenu nettement inferieur à US 905 dollars par habitant. Sur cette base, elle fait partie des PMAs. Un autre facteur est que le pays est très vulnérable économiquement on l’a vu récemment avec le passage du cyclone Isaac et de la tempête tropicale Sandy. Les chocs commerciaux frappent Haïti de manière catastrophique et les chocs naturels ont des répercussions négatives sur le pays et finalement, au niveau de la faiblesse du capital humain, que ce soit au niveau de la scolarisation, de la nutrition et de l’alphabétisation des adultes, Haïti satisfait les trois critères. Le pays n’est pas ipso facto inscrit sur cette liste. Au contraire, il faut une demande formelle du gouvernement pour être inscrit sur la liste. Cette demande avait été faite il y a plus de 10 ans. Donc Haïti jouit encore de ce statut de pays moins avancé – en fait, il y a aussi des avantages liés à ce statut. Maintenant qu’est-ce qui explique cette situation ? Quand vous avez un pays de 27 mille kilomètres carrés et vous voyez qu’après le tremblement de terre on a constaté que 80% des activités économiques sont concentrés à Port-au-Prince, et l’essentiel des recettes fiscales se fait dans la capitale. Celle-ci peut  mourir d’asphyxie. On a une situation où les pôles régionaux n’on pas été suffisamment développés, et la misère force les gens à laisser le milieu rural pour venir à  Port-au-Prince. Ils viennent grossir la population les bidonvilles de la capitale en quête d’emploi. À la moindre occasion, ils prennent le bateau ou l’avion pour quitter le pays. C’est une situation économique constatée essentiellement au cours des dernières 25 années.

Pour répondre à l’autre volet de la question, il n’existe pas un classement des PMAs. C’est tout simplement une liste avec des pays qui sont prêts à sortir et d’autres qui entrent. Mais il y a aussi une période de grâce de trois ans avant de consacrer définitivement qu’un pays soit rayé de la liste.

Qu’est ce qui devrait être fait pour retirer Haïti de cette liste ?

J’aime bien cette question parce que ce qui devrait être fait est en train de se faire maintenant. Il faut premièrement une vision et sortir du ponctuel comme cela a toujours été le cas et avoir une vision de ce qui peut être fait.  Aujourd’hui on a une vision. Un plan stratégique de développement d’Haïti a été mis sur la table. C’est-à-dire, les différents partenaires techniques et financiers d’Haïti savent où se trouve Haïti actuellement et la place qu’elle devra occupée dans les prochaines années. On a parlé aussi de pays émergents. Des pays qui ne sont pas riches mais qui ont une rupture avec une façon de penser et de faire. Des pays comme le Brésil et le Qatar sont des pays potentiellement riches sont sur la liste des pays émergents en même temps que des pays de l’Afrique dont les revenus sont moins élevés sont également sur la liste des pays émergents. Il y a une vision qui est sur la table. Une vision qui est réaliste. Elle part de l’idée que ce pays d’une superficie de 27 mille Kilomètres carrés il faut arriver à investir au niveau des douze pôles régionaux. À partir du Nord Ouest en passant par Ouanaminte, Fort-Liberté, le Cap-Haitien, Gonaives, Saint-Marc, Hinche jusqu'à la péninsule du Sud en passant par Jacmel et les Cayes, il faut arriver à mettre en place les grands équipements sociaux et économiques capables de stabiliser la population, de créer des emplois et de stimuler la richesse. Des plans d’urbanisme et des plans stratégiques ont été élaborés sur trois axes et il appartient maintenant au gouvernement de s’asseoir avec ses partenaires techniques et financiers et de vendre ce plan pour qu’on puisse le financer de manière adéquate.

Pensez-vous qu’on est sur la bonne voie pour que le pays soit considéré « émergent » effectivement en 2030 comme le font croire les autorités locales?

Oui ! On est sur la bonne voie. Mais être sur la bonne voie ne veut pas dire que l’on va arriver à destination. Comme je vous l’ai dit, le pays n’a pas suffisamment de ressources, l’épargne nationale est faible. On n’a pas suffisamment d’épargne pour pouvoir financer ces gros investissements. Il faut donc compter sur l’épargne internationale. Or de ce coté ci aussi vous allez voir que ce n’est pas facile. Vous avez assisté aux différentes promesses faites par le passé et qui n’ont pas été concrétisées en raison du contexte mondial qui est très difficile comme par exemple la récession, période de stagnation et d’inflation qu’on voit venir aussi. Tout ceci risque d’affecter le montant des contributions qu’on espère de la communauté internationale. Mais si tout se passe bien, je dirais qu’on est sur la bonne voie. Mais le développement est une œuvre de longue haleine, ce n’est pas du jour au lendemain qu’on arrivera à développer un pays. Mais on peut déjà mettre les bases pour la transformation structurelle.

Kiskeya : Dans votre présentation du rapport vous avez souligné la nécessité de repenser les politiques relatives au transfert de fonds des ressortissants des 48 PMAs, Pouvez-vous nous donner une idée de la politique appliquée en Haïti sur la question ?

Il faut d’abord voir comment cela se passait avant. Le transfert reçu va financer la consommation de ce qui est importé et cela affecte négativement la balance commerciale. Ces transferts sont utiles et importants  mais leurs affectations peuvent risquer à moyen et à long terme de nuire à l’avenir les changements dans la transformation structurelle de l’économie. Au niveau du ministère des haïtiens vivants à l’étranger, un tas de mesures ponctuelles et structurelles sont en train d’être prises pour canaliser les transferts de fonds en provenance de la diaspora. Des mécanismes seront mis en place pour crédibiliser l’exercice de manière à ce que certains membres de la diaspora puissent non seulement envoyer de l’argent à des proches en Haïti, mais aussi puissent investir dans des pôles de fonds et des structures aptes à accueillir ces fonds et à les investir de façon productive. Deuxièmement, Il faudrait associer de façon plus intime les banques commerciales aux institutions de micro financement. Dans certains pays, la poste qui a un impact beaucoup plus important en régions que les banques commerciales est abondamment utilisée pour ce genre d’exercice. Il faut repenser le rôle de ces services financiers ou bien ajuster ce rôle par rapport au besoin de recanalisation des transferts de fonds qui viennent de la diaspora. Un tas d’initiatives sont en cours et j’espère qu’elles vont porter des fruits. C’est un exercice classique, c’est la tradition que chaque année la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement qui réfléchit sur le sort des pays les moins avancés publie une étude. Les études antérieures ont porté sur la croissance économique, la réduction de la pauvreté, le renforcement des capacités productives, le savoir, la technologie et cette année sur les envois de fonds des diasporas.

Pouvez-vous m’éclairer sur la façon dont l’Etat haïtien compte faire pour recanaliser les fonds de transferts dans des projets de développement puisque ces fonds sont envoyés à des particuliers pour des besoins spécifiques comme l’écolage, le loyer etc. ?

J’ai déjà répondu à cette question en partie. Ce n’est  pas un exercice trop facile si l’on se réfère à l’expérience de l’Irlande et d’Israël. Les fonds envoyés par la diaspora sont destinés à des familles et proches. Les émigrés changent de statut. Les fils des enfants qui sont partis des années de cela détiennent aujourd’hui une maitrise. Donc, imaginer que certains émigrés sont des cerveaux et des compétences bien rémunérés qui peuvent contribuer au développement du pays. Maintenant, s’ils sont certains que le gouvernement haïtien met en place, à travers le ministère mandaté pour le faire, un mécanisme crédible destiné à capter ces épargnes qui viennent de l’extérieur, automatiquement on va commencer à voir la différence au niveau du volume de fonds. Ensuite le ministère réfléchit sur des initiatives pour voir comment un minimum d’argent puisse aller à d’autres choses que la consommation. Comment cette diaspora puisse réunir et prendre la décision d’investir dans un secteur qui soit capable de générer des revenus, pas nécessairement par le biais du gouvernement. Ce genre d’initiative on peut le faire.

Caraïbes : Si je comprends bien, il est prévu un prélèvement sur les transferts ?

Pas un  prélèvement. Un transfert est un acte délibéré de quelqu’un qui envoie de l’argent à un particulier. Mais les mécanismes vont crédibiliser la démarche de manière à créer un climat de confiance. Car celui qui envoie 100 dollars pourrait tout aussi bien envoyer 400 s’il a confiance dans le mécanisme établi. Voilà.

 

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