Soley Levé

27 juin 2014

Soley Levé

François Frantz est l’un des quatre jeunes honorés par sa communauté lors d’un grand rassemblement à Cité Soleil le 25 juin. Elevé dans la précarité, il refuse cependant de céder à la tentation de la violence et œuvre pour son quartier.

A Cité Soleil, ville dans la ville, il fait pousser l’espoir avec son petit jardin maraicher du quartier connu sous le nom de Trois Bébé. Là, les jeunes membres de l’association dont il fait partie produisent toutes sortes de légumes. « La carotte, le gombo, l’épinard… », énumère Frantz. « Nous ne le faisons pas pour gagner de l’argent. Les légumes sont consommés lors de nos compétitions sportives ou distribué aux membres de la communauté ». Le maraichage n’est pas la seule activité du groupe. Une structure dénommée sant comite altenativ pou la pe (Sakala) créée en 2006 sert de laboratoire d’activités sociales comme la scolarisation d’enfants issus des familles démunies, l’assistance aux personnes vulnérables, des cours de danse et le sport.

 

 

Faire de Cité Soleil une commune sans crime

Toutes les activités  de Sakala participent d’un seul et même idéal. Donner aux jeunes une éducation de paix. Ainsi, François propose aux 250 jeunes membres - dont une centaine de filles - une approche fondée sur la prévention. « A Sakala, nous faisons en sorte que, lorsqu’un bandit meurt, aucun autre enfant ne s’enrôle à sa place ».  Il rêve que les enfants « choisissent la scolarisation et la formation professionnelles pour être productifs et non la violence ».

Natif du plus grand bidonville d’Haïti, François sait que la pauvreté alliée à l’oisiveté est mère de tous les vices. « Cité Soleil n’a pas un passé violent. Ce sont les jeunes issus de l’exode rural qui succombent le plus au banditisme, lorsqu’ils n’ont personne pour les accueillir ».

Un modèle pour les jeunes

Né à Cite Soleil en 1976, François Frantz a dû interrompre son éducation en classe de 3e secondaire, après la mort de son père en 1991.

« Apres sa disparition je n’avais plus de soutien », dit-il. Les autres enfants de la famille n’ont pas eu plus de chance que lui. Tous ont quitté l’école avant l’heure. Alors, il choisit de consacrer son temps au sport qui lui permet de canaliser positivement ses énergies. A tel point qu’il crée le club Union en 1988 avec des camarades.

A l’époque, Cité soleil était paisible et les jeunes comme lui passaient le plus clair de leur temps à jouer au ballon. Une époque à laquelle il pense avec mélancolie.

« Il est urgent que nous sortions de cette situation de violence qui nous a été imposée», lance-t-il, sans aller plus loin.

Il transforme son refus de la violence en mouvement collectif. Ainsi est né Sakala, une expérience qu’il partage déjà avec d’autres jeunes de la capitale, de Martissant à Bel Air, en passant par Saint Martin.

 

IMG_7261Photo : Adoum Goulgué/UN-MINUSTAH

 

Le soleil s’est levé sur la cité

A l’issue de trois jours de rencontres entre ces différentes communes, François a été honoré pour son engagement à Sakala. Il a reçu, en compagnie de trois autres jeunes de Cité Soleil, le prix Soley Levé, du nom d’un un mouvement créé localement en 2011 pour appuyer les initiatives positives dans cette commune populaire.

En remettant une plaque d’honneur, un leader communautaire interpelle Frantz : « Je te remets cette plaque pour t’encourager bâtir une nouvelle Cité Soleil afin qu’elle cesse d’être vue comme un territoire de bandits, d’hommes sans honneur. Prends tes responsabilités devant la société ».

François sait que le chemin sera long. Mais déjà, de son potager aux terrains de foot, il a semé des graines de paix en plein cœur de la cité…

 

Antoine Adoum Goulgué